Lors donc qu’un genre a été traité par quelques grands hommes dans un pays ou dans un siècle, pour exciter un nouvel intérêt, et avoir des succès nouveaux, il faut attendre que les idées prennent un autre cours, par des changements dans le moral, dans le physique, et peut-être par des révolutions et des bouleversements. […] misérables intérêts, sources de tant de querelles entre des héros, vous ne prévalûtes jamais dans le cœur de celui-ci aux mouvements de son zèle ; il promit son bras, ses conseils, sa vie, s’il était besoin, mais sous le même général qui commandait déjà l’armée ; il eut beau cependant se dépouiller de ses titres, il les retrouva dans l’estime du général, dans le respect des officiers, et dans l’affection des soldats. […] Cet éloge paraîtrait susceptible d’intérêt et de mouvement ; mais il y en a peu.
Il vient un moment pourtant où, dans l’intérêt et pour le salut de la société, les ânes, même les meilleurs, ne suffisent pas, et où il faut recourir dans le péril au coursier généreux. […] Ils me sont indifférents, et j’ai supérieurement le don de l’intérêt du moment, sans fausseté et sans effort. […] Il y avait tout à côté des réparations cependant et des hommages : « Celui, disait-il, qui a été aimé d’une femme sensible, douce, spirituelle et douée de sens actifs, a goûté ce que la vie peut offrir de plus délicieux. » Il avait dit encore (car M. de Meilhan n’oublie jamais ce qui est des sens) : « Un quart d’heure d’un commerce intime entre deux personnes d’un sexe différent, et qui ont, je ne dis pas de l’amour, mais du goût l’une pour l’autre, établit une confiance, un abandon, un tendre intérêt que la plus vive amitié ne fait pas éprouver après dix ans de durée. » Tout cela aurait dû lui faire trouver grâce, d’autant plus qu’il flattait les hommes moins encore que les femmes : « La femme, remarquait-il, est bien moins personnelle que l’homme, elle parle moins d’elle que de son amant : l’homme parle plus de lui que de son amour, et plus de son amour que de sa maîtresse. » — (Dans l’édition de 1789, l’auteur, en corrigeant, a supprimé çà et là quelques jolis traits.) […] L’affection part du cœur, et la haine, de l’amour-propre irrité ou de l’intérêt blessé. » Cette haine née d’un amour-propre raffiné et d’une ambition déçue s’est encore produite depuis dans un petit écrit, d’ailleurs spirituel, et qui a pour titre : Supplice de Necker. […] [NdA] Comme pendant et contrepartie de cette idée qu’on doit faire peu de confidences à l’âge où l’on vieillit et où l’on perd, M. de Meilhan avait dit, une autre fois, avec beaucoup de justesse : « L’homme a besoin, quand il est jeune, de se répandre ; il se plaît à faire des confidences ; il ne se connaît pas et se croit un être curieux et rare ; il n’a pas enfin la force de garder son secret, et la présomption le porte à croire qu’il inspire un intérêt sincère qui le fera écouter avec plaisir. »
Le volume se compose de deux parties : la principale, qui est la négociation du mariage de la princesse de Saxe, nièce du maréchal, avec le dauphin de France, père de Louis XVI, forme tout un ensemble, et peut être considérée comme un épisode entièrement neuf de la vie du héros, Français de gloire, Saxon de cœur, et qui sut concilier en cette circonstance les intérêts de ses deux patries. […] Blaze de Bury, un Épisode de l’histoire du Hanovre, a tout l’intérêt d’un roman. […] Mais il supplie Auguste de bien peser ses intérêts, d’y réfléchir à deux fois. Dans cette nouvelle carte de l’Allemagne qu’on prétend tailler, l’intérêt évident de la France est d’avoir pour elle la Saxe, et une Saxe agrandie, pour faire contrepoids, à l’est et au nord de l’Allemagne. […] « Je pense, lui écrivait-il (15 septembre 1741), qu’il y va de l’intérêt de la France.
Un fait isolé n’a par lui-même aucun intérêt ; il en prend un si l’on a lieu de penser qu’il pourra aider à en prédire d’autres ; ou bien encore si, ayant été prédit, sa vérification est la confirmation d’une loi. […] J’ai jugé que les trois lectures α, β, γ faites sur mon horloge à trois moments différents étaient dépourvues d’intérêt et que la seule chose intéressante était la combinaison de ces trois lectures. […] Sans doute, cela peut se soutenir, et on conclurait alors que la loi en question, qui peut nous servir de règle d’action à nous qui habitons la Terre, n’a cependant aucune valeur générale au point de vue de la connaissance, et ne doit son intérêt qu’au hasard qui nous a placés sur ce globe. […] On n’a donc pas intérêt à les multiplier. […] Mais vraiment je crois qu’il est sans intérêt d’examiner de semblables hypothèses.
La correspondance qu’il entretint durant ces années, et qui se publie aujourd’hui, offre un intérêt puissant et souvent mêlé de charme. […] M. de Maistre, à un certain moment, désira voir Bonaparte et s’aboucher avec lui au sujet des intérêts de son maître le roi de Sardaigne, alors si écrasé. […] Après Friedland et après Tilsitt, quand le général Savary vint à Saint-Pétersbourg, ce soldat homme d’esprit, et plein d’intelligence, y rencontra M. de Maistre, et il eut le mérite de se prendre d’intérêt et de goût pour lui. M. de Maistre pensa alors qu’il y avait peut-être à tirer parti de cette occasion singulière ; qu’il y aurait quelques bonnes raisons à faire valoir dans les intérêts de son souverain, dépossédé du Piémont et à peu près rayé de la liste des rois. […] Il avait coutume de dire qu’au fond ce qui sépare l’homme de la vérité suprême, c’est l’intérêt que chacun met à sa passion : « Croyez-moi, mon cher ami, entre l’homme et Dieu il n’y a que l’orgueil.
Le Parti Philosophique, dont il est un des Sous-Chefs, a mis ses Eloges de plusieurs Membres de l’Académie des Sciences bien au dessus des Eloges de Fontenelle, parce qu’il est d’usage parmi les Philosophes de ne louer que par comparaison & par intérêt : mais les Littérateurs, que l’esprit de parti n’aveugle point, trouvent que les Eloges du Secrétaire actuel ne sont propres qu’à faire mieux sentir le mérite de ceux de son prédécesseur. Et véritablement celui-ci a su dominer, par la supériorité de son esprit, les matieres les plus ingrates, & répandre sur les plus abstraites la clarté & les agrémens du style ; tandis que M. de Condorcet n’offre, dans les sujets les plus faciles, qu’un style aride, sentencieux, plein de morgue, & dépourvu de toute espece d’intérêt.
L’intérêt du gros livre de M. […] Hardy n’a pas d’intérêt par lui-même, et, du ton qu’il en parle, je ne pense pas que M. […] n’essayerai-je pas de montrer où il est, en quoi précisément l’intérêt en consiste ? […] L’intérêt du sujet est ailleurs, et uniquement dans la nature de la question ou du problème qu’il soulève. […] Je n’ai garde de méconnaître l’intérêt du problème, et je crois que je pourrais le montrer au besoin.
C’est pourquoi ces notes, confuses ou précises, présenteraient au lecteur un intérêt certain. […] Sans être dépourvues d’intérêt, elles ont plus d’emphase que d’élévation. […] La critique n’a aucun intérêt à résoudre cette question. […] Sandeau n’a donc pas seulement fait un livre plein d’élégance et d’intérêt, il a donné un bon exemple. […] Richard est un récit dont l’intérêt ne saurait être contesté.
Et enfin, quel qu’en fût l’intérêt anecdotique, nous ne dirons point comment, d’aventure en aventure et de « suppression » en « suppression », elle est devenue la compilation monumentale dont Chesterfield écrivait à son fils, qui lui demandait s’il en devait faire l’emplette : « Vous l’achèterez, mon fils, et vous vous assoirez dessus, pour lire Candide ». […] Leurs flatteries ont encouragé dans les gens de lettres l’émulation du paradoxe, en même temps qu’elles détruisaient la véritable originalité, « Elles ont dit à l’énergie : « Vous mettez trop d’intérêt aux personnes et aux choses » ; — à la profondeur : « Vous nous prenez trop de temps » ; — à la sensibilité : « Vous êtes trop exclusive » ; — à l’esprit enfin : « Vous êtes une distinction trop individuelle ». […] Si ses contemporains n’ont rien tant admiré chez lui qu’une extraordinaire faculté d’assimilation, servie par une facilité d’exécution ou d’expression non moins extraordinaire, on constate qu’ils les ont d’autant plus admirées qu’ils les ont vues s’appliquer, tour à tour ou ensemble, à plus d’objets, plus différents, plus étrangers eu apparence à ses intérêts d’amour-propre et de vanité. […] Il n’est pas jusqu’à sa vie qui ne participe à la fois du caractère aventureux de celle de Chateaubriand et de Rousseau, sans avoir l’intérêt psychologique de la vie du second ni l’intérêt public ou presque politique de celle du premier. […] Daire), ou presque tous, ne sont à vrai dire que des ébauches dont le principal intérêt se tire du personnage qu’a joué leur auteur.
Il y a un duel constant entre le ciel et les intérêts terrestres. […] Il avait fait faire, dans l’intérêt de la ville, d’excellents chemins qui menaient à ses propriétés. […] La Bertellière appelait un placement une prodigalité, trouvant de plus gros intérêts dans l’aspect de l’or que dans les bénéfices de l’usure. […] La flatterie sous-entend un intérêt. […] Si Charles fût arrivé du fond des Indes, il eût donc retrouvé les mêmes personnages et les mêmes intérêts.
Il y a cinq manières principales d’exprimer sa pensée pour la communiquer aux hommes : La chaire sacrée qui parle aux hommes, dans les temples, de leurs premiers intérêts : la Divinité et la morale ; La tribune aux harangues qui parle aux hommes, dans les assemblées publiques, de leurs intérêts temporels de patrie, de liberté, de lois, de formes de gouvernement, d’aristocratie ou de démocratie, de monarchie ou de république, et qui remue leurs idées ou leurs passions par l’éloquence de discussion, l’éloquence parlementaire ; La place publique, où, dans les temps de tempête, de révolution, de sédition, le magistrat, le tribun, le citoyen monte sur la borne ou sur les marches du premier édifice qu’il rencontre, parle face à face et directement au peuple soulevé, le gourmande, l’attendrit, le persuade, le modère et fait tomber de ses mains les armes du crime pour lui faire reprendre les armes du patriotisme et des lois. […] Ils la maniaient à leur fantaisie dans leurs intérêts et dans les intérêts de l’Église. […] Ignorez-vous l’intérêt qu’elle y prend ? […] Mais l’intérêt de la religion était tellement confondu dans sa pensée avec l’intérêt de Mme de Maintenon et avec sa propre gloire, qu’il était servile, adulateur et ingrat en conscience, et que son caractère était corrompu par son zèle pour le trône et pour la foi. […] XXII Le second acte, très faible d’intérêt tragique, n’est rempli que par des conversations entre Assuérus, son confident Hydaspe et son ministre Aman, conversations dans lesquelles Assuérus apprend que le Juif Mardochée lui a sauvé la vie en lui révélant une conjuration de ses sujets contre sa personne.
Dans son éloge de M. de Lamure, Vicq d’Azyr parlant des succès de ce professeur de Montpellier, raconte que lorsqu’on félicitait M. de Lamure déjà vieux sur l’intérêt de ses cours, celui-ci répondait : « C’était dans ma jeunesse qu’il fallait m’entendre. » Et Vicq d’Azyr à ce propos, ramené de quatorze ans en arrière à ses propres souvenirs, ne peut s’empêcher de s’écrier : Combien, en effet, cette jeunesse dont on se méfie tant n’a-t-elle pas opéré de prodiges ! […] Une jeune fille, nièce de Mme Daubenton, ayant été saisie d’un évanouissement près d’une salle d’étude où était Vicq d’Azyr, celui-ci accourut, prodigua ses soins à la jeune malade, et lui inspira un soudain intérêt qui se consacra bientôt par un mariage : ce mariage dura peu, et la mort de la jeune femme laissa Vicq d’Azyr veuf, et libre de nouveau, ce qui ne nuisit pas à ses succès dans le monde : mais il avait acquis l’amitié de Daubenton et les moyens, grâce à lui, d’étendre ses recherches d’anatomie sur les animaux étrangers. […] Il était de l’intérêt de la haute administration d’avoir une sorte de conseil médical consultatif, libre des préjugés et de la routine, dégagé des lenteurs d’écoles, prévenant sans entêtement les abus de l’empirisme, ou en accueillant, s’il y avait lieu, les bons résultats, et prêt à répondre, à donner un avis sur quantité de questions à l’ordre du jour. […] Il y a bien des années que, lisant de suite ce recueil des notices historiques de Vicq d’Azyr, simple étudiant alors et en chemin d’être médecin moi-même, mais hésitant encore entre plusieurs velléités ou vocations, il m’a été donné d’en saisir le doux intérêt et le charme ; en passant de l’un à l’autre de ces personnages, je sentais varier mes propres désirs ; chacun d’eux me disait quelque chose ; l’idée dominante que l’auteur avait en vue et qu’il exprimait dans la vie de chacun de ces savants m’apparaissait tour à tour et venait me tenter, même lorsque cette idée dominante n’était que des plus modestes : car il y a cela de particulier dans la touche de Vicq d’Azyr, qu’une sorte de sympathie y respire et que le coloris léger n’y dérobe jamais le fonds humain.
Ainsi, après avoir enregistré quelque interdiction légale, dont l’application s’était faite le jour même, il passait brusquement, sans transition, à des nouvelles de l’autre monde et des pays transatlantiques : « Le Pérou vient de déclarer la guerre à l’Équateur… » ou bien : « On n’apprendra pas sans intérêt que la route qui vient d’être ouverte entre San-Francisco et la Nouvelle-Orléans abrégera d’une semaine le temps exigé naguère, etc. » Puis venait l’histoire des oiseaux du Palais de Cristal à Londres, les perroquets et les perruches qu’on avait représentés dans le catalogue comme d’excellents parleurs, et qui, « intimidés apparemment par la présence du public, ont gardé le silence » ; de jolies malices enfin, un peu renouvelées de Swift, mais accommodées à la française. […] On dirait que son intérêt et sa passion, son point d’honneur et son engagement sont ailleurs. […] Je laisse de côté sa vocation politique active que j’admets en effet qu’il manque, je lui trouve deux talents de second plan, deux pis aller qui seraient de nature à satisfaire de moins difficiles : talent d’écrivain politique qui trouvera toujours moyen de dire ce qu’il pense, et qui a même intérêt à être gêné un peu ; car il y gagne le tour, et avec le tour l’agrément, ce qui cesse quand il écrit dans les journaux où il ne se gêne pas ; — talent de critique ou de discoureur littéraire des plus sérieux et des plus aimables, qui peut se jouer sur tous sujets anciens ou modernes, et s’exercer même sur des matières de religion, d’un ton de philosophe respectueux à la fois et sceptique. […] Je me le suis dit assez souvent à moi-même, j’ai le droit de le dire aux autres : prenons garde que notre jugement ne soit suborné par le plus subtil et le plus délié des intérêts, celui de notre esprit.
L’intérêt réel est tout entier dans le sujet même, pleinement et sincèrement compris et aimé, et traité franchement et grassement, si je puis dire. […] Les conseils économiques y sont tout à fait déjà dans le sens du Bonhomme Richard et à la Franklin, sur les fruits du travail, sur les petits profits accumulés, sur l’importance du bon voisinage à la campagne, sur le prêté rendu des services mutuels où l’intérêt trouve son compte en même temps que la morale : rien pour rien ; avarice ou générosité, selon l’occasion, en vertu d’un seul et même principe, l’intérêt bien entendu. […] Les conseils moraux y reviennent toujours, et dans le même sens de l’intérêt bien compris : s’acquérir une bonne renommée parmi les hommes, car la renommée est aussi une déesse, — nous dirions une puissance.
Il est sensible à un entremets, il est heureux d’un vêtement neuf. » 18 juin : Attaque épileptiforme : « Avant-hier, jeudi, il me lisait encore les Mémoires d’outre-tombe, car c’était le seul intérêt et la seule distraction du pauvre enfant. […] Elles n’ont, d’ailleurs, pas d’autre intérêt. […] L’intérêt de ces débuts universitaires est, d’ailleurs, surtout anecdotique. […] Trousseau en exprima l’intérêt, même au point de vue médical pur, dans les pages savoureuses qui ouvrent le recueil de ses magistrales cliniques : « Que les nosologies soient utiles à celui qui commence l’étude de la médecine, j’y consens au même titre qu’une clef analytique est assez bonne, au même titre que le système si faux de Linné peut être fort utile à celui qui essaie l’étude de la botanique ; mais, Messieurs, si vous connaissez assez pour pouvoir reconnaître, permettez-moi cette espèce de jeu de mots, hâtez-vous d’oublier la nosologie, restez au lit du malade, cherchant sa maladie comme le naturaliste étudie la plante en elle-même dans tous ses éléments.
Ses intérêts de cœur ou d’esprit en rendirent la marche irrégulière et inégale. […] De cette idée vient la facilité avec laquelle Mme de Staël a passé de la monarchie à la république : elle fait de la conservation sociale, identifiée à l’intérêt des propriétaires, l’objet principal du gouvernement ; et ainsi, roi ou président, peu importe ce que sera l’exécutif, pourvu que ceux qui possèdent soient protégés contre la masse des « hommes qui veulent une proie », et que « tous leurs intérêts portent au crime », dès qu’on leur permet d’agir. […] Les deux premières parties se rapportent plus étroitement à l’Allemagne ; elles sont plus précises, plus objectives en un sens, d’un intérêt plus général et plus efficace : la seconde fonde la critique romantique.
Présenter la chemise au roi et aux princes, obtenir le bougeoir, faire des visites de deuil en mante ou sans mante, avoir le droit de s’enrhumer dans les carrosses du roi et d’étouffer dans un entre-sol de Marly, tels sont les graves intérêts qui emploient les forces, la pensée, le crédit des hommes les plus capables, et qui, selon l’issue, les transportent de bonheur ou les plongent dans l’extrême désespoir. « Hélas ! […] C’était la mendicité à main armée, la guerre entreprise contre l’intérêt public, le vol pratiqué contre l’État par les défenseurs naturels de l’État. […] Cousin défend aussi ses intérêts de cœur. […] Quel intérêt dans « ces aveux », dans ces « réponses que l’auteur se fait à lui-même !
Nous verrons, en examinant la littérature du Nord, quelle source d’émotions on peut trouver dans une religion d’un autre caractère ; et je montrerai, en parlant de la littérature moderne, comment les idées religieuses du christianisme étant trop abstraites et trop mystiques pour être représentées sur le théâtre, les auteurs dramatiques ont dû s’occuper uniquement d’exciter l’intérêt par l’énergique peinture des passions. […] Les spectateurs étaient si facilement émus, prenaient un si vif intérêt à la souffrance, que cette certitude mettait le poète en confiance avec ses auditeurs ; il ne redoutait pas (ce qu’on doit craindre de nos jours jusque dans les fictions) d’importuner par la plainte, comme si l’infortune, dans les tableaux d’imagination, pouvait encore fatiguer l’égoïsme. […] Leur destinée était pour les Grecs un sujet national ; le poète dramatique, en les représentant, n’avait qu’à développer les idées reçues : il n’était point obligé de créer à la fois le caractère et la situation ; le respect et l’intérêt existaient d’avance en faveur des hommes qu’il voulait peindre.
Vu cet égal dénuement d’intérêt des diverses manières possibles, il ne restait que d’oublier que cette conférence est le prologue d’une représentation et de l’utiliser à traiter verbalement un sujet agréable ou utile : l’impôt sur les revenus, le pari mutuel, la question congolaise. […] Quel est l’intérêt de la conférence et, depuis qu’on a inventé d’abord l’écriture, ensuite l’imprimerie, enfin la presse, demeure-t-il quelque profit à se déranger pour l’audition d’un soliloque en un lieu clos ? […] Ces danois, ces norvégiens, ces slaves (je ne parle pas d’Ostrowski, d’Ibsen, de Bjornson, dont nous savons des œuvres si belles), mais les autres, les moindres, les barbari minores, ont leur intérêt.
Pour nous, qui ne connoissons que ces deux intérêts en matiere de Littérature, nous ne craignons pas d’assurer que cet Ouvrage est non seulement un Poëme, mais encore un des plus beaux Poëmes épiques qui aient été faits. […] Homere & Virgile ne le cedent-ils pas souvent à Fénélon du côté de l’intérêt général, des intérêts particuliers, de la vérité des caracteres, de la beauté des sentimens, de la sublimité de la morale ? […] Le Télémaque se fait lire toujours avec le même intérêt.
Lord Byron, à lui seul, l’emporte, en intérêt littéraire et surtout en intérêt de nature humaine, sur tous ces Allemands sans passion ardente et profonde et qui n’ont de nature humaine que dans le cerveau… La vie de ce grand poëte, qui s’est élevé jusqu’au grand homme, est autre chose que celle de ces travailleurs en rêveries dont l’existence ressemble à une table des matières de leurs œuvres, dans laquelle elle tient… Pour tout homme, pour tout être si heureusement et si puissamment organisé qu’il soit, la vie de Byron est un sujet de critique et de biographie de la plus redoutable magnificence ; car Byron fut comme le plexus solaire du xixe siècle, et tous les nerfs de la société moderne, cette terrible nerveuse, aboutissent à lui… Toucher à cet homme central, magnétique et vibrant, qui mit en vibration son époque, c’est toucher à l’époque entière… Jusqu’ici, ceux qui y ont touché s’y sont morfondus. […] Elle est pourtant allée en Angleterre dans l’intérêt de ces deux volumes, mais elle n’en a rien rapporté… Elle a beau citer les plus splendides vers de lord Byron, à toutes places, pour nous empêcher de fermer le livre et de la planter là, nous voyons mieux à ce soleil des vers de, Byron, qu’elle n’est que la lune de tout le monde.
Mathilde de Toscane41 I Le premier mot de la préface de ce livre sur Mathilde de Toscane 42, c’est que, « s’il emprunte aux circonstances actuelles un intérêt de plus, il n’est pas né du moins de ces circonstances ». […] Nous avons, nous, une lumière allumée par la foi pour voir en cet homme providentielles grâces d’état que Dieu lui a communiquées, dans les intérêts d’une fonction sans laquelle le monde périssait, mais Renée ne l’a pas, cette lumière, et pourtant il a vu cette infaillibilité et il a dit qu’il l’avait vue ! […] Tous les intérêts du temps, l’avenir des institutions chrétiennes, remplissaient sa vaste pensée.
Tout cela est si gros de visée, et dans le détail, comme on le verra, si blessant pour les idées acquises, si révoltant au premier abord, pour les éducations et les impressions contemporaines, que la Critique, fût-elle persuadée que la vérité est ici du côté de l’audace, doit, dans l’intérêt même du livre, s’interdire d’abord tout ce qui en dépasserait l’analyse complète et fidèle. […] Le livre des Esprits est divisé en deux parties, l’une sur les phénomènes subjectifs (internes), l’autre sur les phénomènes objectifs (externes), et l’intérêt de cette seconde partie est aussi animé que l’intérêt de la première.
Aujourd’hui un tout autre sentiment dirige les recherches dans le même sens, c’est l’intérêt de plus en plus vif qui s’attache à tout ce qui a pu servir son génie, c’est le désir de montrer comment l’imagination ne crée point de rien, comme quelques-uns se le figurent, mais transforme et vivifie ce qu’elle touche, et d’une chose morte fait une chose impérissable. […] Il y a, comme on le voit, un grand intérêt à déterminer aussi exactement que possible quel est le contingent que la comédie italienne a apporté à Molière et par lui à notre littérature comique.
Ce que je sais bien, c’est que, lorsque j’ai eu à m’occuper d’Hégésippe Moreau, je me suis enquis avec attention et intérêt de tout ce qui pouvait le faire aimer, estimer ; je me suis adressé aux amis de son enfance, à la fermière, à la personne qui le connut dans la petite imprimerie proprette où il passa quelques jours heureux. […] Ils éludèrent toujours la question, et je me résignai à la patience, persuadé que ces messieurs, préoccupés de graves intérêts politiques, n’avaient pas de temps à donner à la littérature.
Où le trouverait-il, puisque, selon lui, la souveraineté n’est qu’un principe matériel et brutal, fondé seulement sur un intérêt physique et mutuel résultant de nos seuls besoins charnels ici-bas ? […] Or la souveraineté ne peut être une fiction, puisqu’elle est chargée de régir les plus formidables des réalités, les intérêts, les passions et l’existence même des peuples. […] Ce n’est donc pas la question de savoir laquelle de vos lois est plus monarchique ou plus républicaine, plus autocratique ou plus démocratique, mais laquelle est plus imprégnée de règle innée, de justice divine, de moralité supérieure à l’abjecte matérialité des intérêts purement physiques de l’espèce humaine. […] Il s’approprie les fruits de l’arbre, l’herbe des sillons, la chair des animaux, nourriture sanglante, presque criminelle, et, si on l’en exproprie, il meurt dépossédé de sa part à l’alimentation nécessaire à la vie, convive affamé chassé du banquet terrestre ; et ce banquet même tarit pour tous les convives : car, si la terre n’est pas possédée par celui qui l’ensemence et la moissonne, nul n’a intérêt à la cultiver et à l’ensemencer. […] Ce n’est pas seulement la nature, ce n’est pas seulement la justice innée qui fait la loi : c’est l’utile, c’est l’intérêt politique de la forme sociale dans laquelle la propriété héréditaire est distribuée entre un et plusieurs, entre plusieurs et tous ; c’est l’inégalité ou l’égalité de partage correspondant à l’égalité ou à l’inégalité des droits civils, à la souveraineté d’un seul, ou à la souveraineté de plusieurs, ou à la souveraineté de tout le peuple.
Je vois d’une part l’intérêt social, et d’autre part l’intérêt de la défense ; je sais qu’ils se limitent l’un l’autre, et par leur conflit même ; cependant, et tour à tour, on essaye de me persuader qu’ils doivent l’emporter l’un sur l’autre. […] Quel intérêt veut-on que nous prenions à Pierre Doublet ? […] Mais je parle de ces causes où se trouvent parfois enveloppés des intérêts plus généraux qu’elles-mêmes. […] Mais il y a quelque chose dans les annales de l’éloquence judiciaire ; à défaut d’intérêt littéraire, elles ont un intérêt historique certain ; et ce que l’on y trouve ne se trouve que là. […] Car, la matière est un peu abstraite, et je crains que l’intérêt même n’en soit pas immédiatement senti.
Le publiciste éclairé dégageait à merveille les idées et les intérêts ; mais alors on avait à compter avec les passions. […] Les opinions ne demandent aujourd’hui qu’à devenir des lois, et ces lois n’ont point à briser des habitudes, des préjugés, des intérêts, toutes ces entraves inévitables et souvent légitimes qui gênent presque en tous lieux l’essor de la vérité. […] Avoir su trouver l’intérêt, l’émotion, la bonne plaisanterie, l’ action enfin, dans la dialectique, dans les catégories, dans la scolastique, le détour assurément doit sembler original et neuf. […] Et de quel prix serait la vie, avec les passions qui la corrompent et les chagrins qui la désolent, de quel intérêt serait la société que l’erreur égare et que la force ravage, sans le besoin de chercher la vérité et le devoir de la dire ? […] Le succès fut grand, prodigieux ; durant deux hivers l’intérêt se soutint, et la conversation vécut presque uniquement là-dessus ; mais, cette fois, ce n’était pas un intérêt passager dû à la nouveauté du genre, à la vivacité de quelques tableaux ; le sérieux du fond, l’amusant du détail, l’ampleur et la variété du développement, le caractère passionné et dramatique qui pénétrait jusque dans les portions les plus élevées du sujet, tout attestait une œuvre durable.
Ce n’est pas non plus l’esprit tout politique d’un théâtre où les plus graves intérêts de la République étaient audacieusement discutés, comme du haut d’une tribune burlesque. […] Sans jamais tendre notre esprit par aucun effort d’attention soutenue, sans nous attacher même par aucun intérêt sérieux, son théâtre nous retient par les seuls attraits d’une poésie et d’une gaieté toujours épanouies. […] J’aimerais en particulier le déguisement de M. de Pourceaugnac en femme, si le danger véritable que court à cette occasion ce pauvre gentilhomme, ne m’inspirait un intérêt trop sérieux pour être compatible avec la gaieté comique. […] La manie d’enfouir ce qu’on possède ne va guère avec celle de rien prêter, même à gros intérêts. […] Puisque l’homme, par le dévouement, par le sacrifice de ses intérêts, s’élève à la dignité tragique, l’idée exclusive du moi est ce qui doit en faire un personnage de comédie, et, en effet, tous les rôles vraiment comiques représentent des égoïstes achevés.
On rédigea sur son avis le décret du sénat, conçu dans les termes les plus forts et les plus expressifs, dont le résultat était que, toutes les fois qu’il s’était agi de l’intérêt du peuple romain, jamais la sagesse ni la fidélité du sénat n’avaient manqué à la république. […] Écoutez en passant ces définitions du bon sens : « L’honnête est ce que l’on est forcé d’estimer par soi-même, abstraction faite de toute espèce d’intérêt personnel, etc. » (Quelle preuve de Dieu par la conscience !) […] N’est-ce qu’après avoir calculé leur intérêt qu’ils entrent dans le combat et qu’ils versent à flots leur sang pour la patrie ? […] « Vous savez qu’il avait une avidité insatiable de lecture, jusque-là que, dans le sénat même, et pendant que les sénateurs s’assemblaient, il se mettait à lire, sans se soucier des vaines rumeurs qu’il exciterait dans le public, et sans dérober pourtant un seul des instants qu’il devait aux intérêts de l’État. […] Au moins, il me semble que vous écoutez avec beaucoup d’intérêt les leçons d’Antiochus