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1689. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

Un jugement, même implicite, même privé des motifs particuliers qu’il suppose, mais porté en plein sur un point de caractère par un proche témoin circonspect et véridique, peut démentir décidément et ruiner bien des anecdotes futures, que de gauches récits voudraient autoriser. […] Un prêtre illustre qui est plus à nos yeux qu’un écrivain, et dont le saint caractère grandit en ce moment dans l’humilité du silence  ; un philosophe méconnu , qui avait doté notre siècle de naturelles et majestueuses peintures ; puis des poëtes admirés du monde et surtout préférés de nous, comme celui que nous abordons en ce moment : ce sont là nos seuls choix jusqu’ici, et désormais nous n’en prévoyons guère d’autres. […] Il devait en préparer à loisir les matériaux, approfondir les caractères des personnages, de Clotilde, de saint Remi, mûrir les combinaisons principales : quant à l’exécution proprement dite, il l’ajournait jusqu’à trente ans.

1690. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

Mais j’eusse mieux aimé un livre plus historique, plus suivi, plus astreint à son sujet, moins conjectural en inductions sur le caractère des poëtes, moins plein de préoccupations très-modernes. […] Il voit en lui le type de ce qu’on appelle l’homme de talent, ce qui veut dire l’homme de peu de talent, qui a la prétention d’en avoir ; et là-dessus il fait sur ce caractère de l’homme de talent quatre à cinq longues pages spirituelles, mais d’une déclamation comme j’en chercherais vainement dans Sénèque le père ; un morceau à effet, à allusions, tout en hors-d’œuvre, un développement, comme on dit dans l’école. […] Grâce à lui, ce caractère si profond, si creusé, si énergique, si généreux au travers de ses arrière-pensées, et dans ses complications mêmes si précis, est devenu un peu plus qu’auparavant un problème pour ceux qui ne l’ont pas connu ; il est devenu matière à récrimination, et, qui pis est, à amplification.

1691. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES FRAGMENTS ET LETTRES DE BLAISE PASCAL, Publiés pour la première fois conformément aux manuscrits, par M. Prosper Faugère. (1844). » pp. 193-224

Cousin, s’était porté en avril 1842 sur Pascal, au moment où d’autres écrivains s’en occupaient également ; mais il s’y était porté avec les caractères propres à sa nature entraînante et impétueuse. […] Durant cette phase, qui est la seconde de la critique française, et qui se produit par madame de Staël, Benjamin Constant et leur école, le caractère de la critique, tout en gardant son but de théorie et son idée, devient déjà historique, elle s’enquiert et tient compte des circonstances dans lesquelles sont nées les œuvres. […] Cette écriture, presque illisible pour ceux qui ne l’ont pas étudiée, a quelque chose du trait impatient et fougueux de Napoléon ; mais, quoiqu’à demi formés, les caractères ont la fermeté et la netteté du burin. » C’est moins, on le conçoit, avec les yeux mêmes qu’avec la sagacité comparative et par la pénétration du tour, du jet habituel à Pascal, qu’on arrive à déchiffrer une écriture aussi elliptique ; aussi, à quelqu’un qui lui disait que ce travail devait bien lui fatiguer les yeux, M.

1692. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Nous y rangerons aussi ceux des critiques littéraires, à proprement parler, qui, à tête reposée, s’exercent sur des sujets déjà fixés et établis, recherchent les caractères et les beautés particulières aux anciens auteurs, et construisent des Arts poétiques ou des Rhétoriques, à l’exemple d’Aristote et de Quintilien. […] Le désintéressement et l’amour de la paix comme de la vérité étaient son caractère ; c’était une âme divine. » 125. […] Sur le caractère de Bayle, on peut lire quelques pages agréables de D’Israeli Curiosities of Literature, t. 

1693. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

Ceux qui l’exercent sont ses employés. « Il peut les établir et les destituer quand il lui plaît. » Vis-à-vis de lui, ils n’ont aucun droit. « Il n’est point question pour eux de contracter, mais d’obéir » ; ils n’ont pas de « conditions » à lui faire ; ils ne peuvent réclamer de lui aucun engagement  Ne dites pas qu’à ce compte aucun homme un peu fier et bien élevé ne voudra de nos charges et que nos chefs devront avoir un caractère de laquais. […] Neuvième époque), on se vit obligé de renoncer à cette politique astucieuse et fausse qui, oubliant que les hommes tiennent des droits égaux de leur nature même, voulait tantôt mesurer l’étendue de ceux qu’il fallait leur laisser sur la grandeur du territoire, sur la température du climat, sur le caractère national, sur la richesse du peuple, sur le degré de perfection du commerce et de l’industrie, et tantôt partager avec inégalité les mêmes droits entre diverses classes d’hommes, en accorder à la naissance, à la richesse, à la profession, et créer ainsi des intérêts contraires, des pouvoirs opposés, pour établir ensuite entre eux un équilibre que ces institutions seules ont rendu nécessaire et qui n’en corrige même pas les influences dangereuses. » 430. […] M. de Barante, Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle, 318. « On s’imaginait que la civilisation et les lumières avaient amorti toutes les passions, adouci tous les caractères.

1694. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

Ces accès assombrissent et enveniment par moments son caractère. […] Or, nous le répétons ici, le caractère spécial de David, c’est d’exprimer l’âme de l’humanité dans toutes les phases, dans tous les sentiments, dans tous les lieux, dans tous les temps. […] XXVI Le seul caractère de ce lyrisme dans toutes les nations, et surtout dans les nations jeunes, que leur jeunesse même enivre de poésie, est précisément ce délire, ce balbutiement confus des lèvres de cette femme et des hymnes du berger de Judée.

1695. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Le scepticisme, de Montaigne : son caractère, remède au fanatisme. […] Car presque tous les caractères, presque toutes les aspirations de l’esprit classique ont trouvé déjà leur formule dans Montaigne. […] Et l’un des caractères éminents qu’il offre, c’est celui par lequel la littérature classique apparaît surtout comme une des plus pures formes de l’esprit français : c’est cet ensemble de qualités sociables, cette vive lumière d’universelle intelligibilité, qui fait des Essais un livre humain, et non pas seulement français.

1696. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

C’est ce qui sera non seulement son œuvre principale, mais son esprit même, cet esprit qui se forme parmi les distractions, les imitations momentanées, les hésitations des débuts, comme se forme le caractère dans le trouble des premières passions et parmi les contradictions des premières expériences. […] Cependant, si La Bruyère ne s’est pas fait tort en disant de ses Caractères. […] C’est là tout à la fois le caractère de la raison dans l’Esprit des lois et l’histoire de la fortune de ce livre.

1697. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

Tout habilement adoucie qu’elle soit, — et c’est là peut-être la seule faute de la comédie corrigée, — sa crédulité n’en semble pas moins encore un peu forte lorsqu’on la rapporte à son nouveau caractère. […] Le caractère assombri et voilé de Diane répand, autour de lui, son chaste clair-obscur. […] Aucun caractère, à part celui de Diane ; car je ne puis prendre pour des figures ni l’insignifiante esquisse de M. de Pienne, ni les effigies de Louis XIII et de Richelieu, ni la caricature de M. 

1698. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

Même conception radicalement fausse des situations et des caractères, même désordre de moralité et d’idées. […] Lionnette a le charme des demi-folles, un caractère brusquement sculpté, à vives arêtes et à lignes saillantes : on comprend qu’elle puisse fasciner. […] Des traits d’observation saisissante, pris sur le vif de l’âme féminine, se mêlent au grimoire de ses caractères ; son héroïne est de fière étrangeté et de grande allure.

1699. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de Pompadour. Mémoires de Mme Du Hausset, sa femme de chambre. (Collection Didot.) » pp. 486-511

Pourtant le caractère de Louis XV étant donné, c’est encore ce qui pourrait peut-être arriver de, mieux à ce roi que de tomber aux mains d’une femme « née sincère, qui l’aimait pour lui-même, et qui avait de la justesse dans l’esprit et de la justice dans le cœur : cela ne se rencontre pas tous les jours. » Telle est, du moins, l’opinion de Voltaire, jugeant Mme de Pompadour après sa mort. […] Louis XV, si méprisable par le caractère, n’était pas un homme sans esprit ni sans bon sens. […] Ce livre de Mme Du Hausset laisse une impression singulière ; il est écrit avec une sorte de naïveté et d’ingénuité qui s’est conservée assez honnête dans le voisinage du vice : « Voilà ce que c’est que la Cour, tout est corrompu du grand au petit », disais-je un jour à Madame, qui me parlait de quelques faits qui étaient à ma connaissance. — « Je pourrais t’en dire bien d’autres, m’ajouta-t-elle ; mais la petite chambre où tu te tiens souvent t’en apprend assez. » Mme de Pompadour, après le premier moment passé de féerie et d’éblouissement, jugea sa situation ce qu’elle était, et, tout en aimant le roi, elle ne garda aucune illusion sur son caractère ni sur l’espèce d’affection dont elle était l’objet.

1700. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Tout annonce qu’il s’y distingua, et l’on croira sans peine qu’en appréciant la précocité de son talent, ses maîtres eurent de bonne heure à reconnaître le tour peu maniable de son caractère. […] Vous n’êtes point seulement le député d’une province, vous êtes celui de l’humanité et de la République. » Ces deux hommes, dont l’un avait dix ans de moins que l’autre, se convenaient par un caractère également sombre, méfiant, concentré, une ambition froide, un orgueil implacable, une personnalité cruelle, un appareil d’intégrité et de respect d’eux-mêmes qui les distinguait et les isolait des autres chefs de la démocratie. […] Mon appréciation du caractère de Saint-Just ne dépend point, d’ailleurs, de ces premiers actes de jeunesse, même quand ils se seraient passés comme M. 

1701. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

Ces deux amis, qui prirent alors l’engagement, avec les admirateurs de Maurice de Guérin, de publier prochainement tout ce qui est sorti de sa plume, pensèrent à faire précéder leur publication d’un petit volume et eurent à cœur d’en bien déterminer le caractère. […] II Pour qui croit à la forte influence de la race sur le caractère, le génie et la beauté des hommes (et je suis de ceux qui ont cette faiblesse, il ne sera pas indifférent de savoir quelle fut cette famille de Guérin qui a fini par deux poëtes, le frère et la sœur. «  Les chroniques de notre maison nous disent de race vénitienne », a écrit Mlle Eugénie, avec cette plume de cygne croisé d’aigle que ses doigts délicats tiennent parfois si droite et si ferme, et qui aurait écrit l’histoire aussi bien qu’autre chose. […] Le caractère de Mlle de Guérin n’éprouva aucun changement de la maladie.

1702. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Quatre moments religieux au XIXe siècle. »

Les nouvelles Lettres, publiées par l’abbé Perreyve, ont un tout autre caractère que ces trois Lettres ou discours à Emmanuel. […] et félicitons-les de faire preuve, grâce à une tolérance forcée, d’un si bon et d’un si heureux caractère !

1703. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  second article  » pp. 342-358

On sait qu’Aristarque a quelquefois changé, qu’il a sans doute plutôt adouci ; qu’en cet endroit, par exemple, où Phœnix s’adressant à Achille dans l’espoir de le fléchir se reporte vers sa propre jeunesse et raconte comment lui-même il a failli un jour devenir parricide, le critique avait cru devoir retrancher cette parole terrible, pour ne pas faire tache à ce caractère vénérable qu’il craignait de voir profaner. […] Les comparaisons, si l’on pouvait s’y étendre et citer, seraient un autre champ bien vaste, et où l’on ferait ressortir dans toute sa variété le caractère de génie du poëte.

1704. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

Quelques hautes pensées, qui n’ont jamais quitté le poëte depuis son enfance jusqu’à sa mort, dominent toutes ses belles odes, s’y reproduisent sans cesse, et, à travers la diversité des circonstances où il les composa, leur impriment un caractère marquant d’unité. […] On alla jusqu’à dire qu’il l’avait vendue au prince, et, chose fâcheuse pour le caractère de Le Brun, plusieurs ont pu le croire. — Voir son élégie infamante à Némésis, où il trouve moyen de flétrir d’un seul coup sa mère, sa sœur et sa femme !

1705. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Rodolphe Topffer »

Son triple talent d’observateur de caractères, de paysagiste expressif et d’humoriste folâtre, s’y croise et s’y combine presque à chaque page ; le pressentiment fatal à demi voilé s’y fait jour aussi : « Cette fois, en déposant le bâton de voyageur, nous dit-il, celui qui écrit ces lignes se doute tristement qu’il ne sera pas appelé à le reprendre de sitôt… Pour voyager avec plaisir, il faut pouvoir tout au moins regarder autour de soi sans précautions gênantes, et affronter sans souffrance le joyeux éclat du soleil. […] Il ressentit d’abord, en y arrivant, une grande impression de solitude ; le bruit et la vanité qui, jusque dans la maladie, continuent de faire la vie apparente de ces grands rendez-vous, l’offusquaient ; il avait, si l’on ose le dire, quelques préventions un peu exagérées contre ce qu’il appelait notre beau monde ; nature genuine, comme disent les Anglais, il avait avant tout horreur du factice ; mais il ne tarda pas à s’y lier d’un commerce en tout convenable à son caractère et à son esprit avec quelques personnes qui lui prodiguèrent un intérêt affectueux, et particulièrement avec M. 

1706. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « III. Quelques mots sur l’explication de textes »

Il ne s’agit pas seulement de reconnaître ce qui a été vraiment pensé, senti, exprimé par Montaigne et Pascal, par Racine et Victor Hugo ; mais dans ce qui va au-delà de ce qu’on peut raisonnablement appeler leur sens, au-delà des plus fines suggestions qu’on a droit de rapporter encore à leur volonté plus ou moins consciente, dans ce qui n’est plus vraiment que moi, lecteur, réagissant à une lecture comme je réagis à la vie, il ne faut tout de même pas confondre ce qui est le prolongement, l’effet direct, normal, et comme attendu de la vertu du livre, avec ce qui ne saurait s’y rattacher par aucun rapport et ne sert à en comprendre, à en éclairer aucun caractère. […] Notre maître, en ceci, est La Bruyère, qui a écrit : « L’étude des textes ne peut jamais être assez recommandée… Ayez les choses de la première main, puisez à la source ; maniez, remaniez le texte ; … songez surtout à en pénétrer le sens dans toute son étendue et dans ses circonstances. » (Les Caractères, ch. xiv : De quelques usages.)

1707. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Les femmes de France : poètes et prosateurs  »

Comme leur sexe les rend très malléables aux influences extérieures, elles représentent avec moins de mélange peut-être que les hommes, l’esprit des temps où elles ont vécu ; et, en outre, comme la vocation littéraire chez les femmes suppose, plus que chez nous, par son caractère d’exception, un don spontané et original ou une vie un peu en dehors de la règle commune, presque toutes nous offrent, en effet, dans leur caractère ou dans leur existence, des traits imprévus et piquants.

1708. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Deux tragédies chrétiennes : Blandine, drame en cinq actes, en vers, de M. Jules Barbier ; l’Incendie de Rome, drame en cinq actes et huit tableaux, de M. Armand Éphraïm et Jean La Rode. » pp. 317-337

Une seconds difficulté, pour l’auteur, était dans le caractère étrangement et violemment exceptionnel des sentiments et de l’héroïsme de ses personnages. […] Elle revêt donc assez aisément un caractère révolutionnaire.

1709. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Sa mélancolie est même d’un caractère plus positif, plus charnel, et confinant quelquefois à la tristesse antique. […] Gautier quelques heureuses innovations métriques, par exemple, l’importation de la terza rima, de ce rythme de La Divine Comédie qui n’avait pas reparu dans notre poésie depuis le xvie  siècle, et qui a droit d’y figurer par son caractère gravement approprié, surtout quand il s’agit de sujets toscans. — Tout à côté, on peut admirer à la loupe une fine miniature chinoise sur porcelaine du Japon.

1710. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Seconde partie. » pp. 35-56

Faut-il s’étonner s’il dédaigne tout spectacle de vanité & de luxe, s’il chérit cette simplicité, vrai caractère de la grandeur, soit dans les Arts soit dans les mœurs. […] Tandis que l’ennemi des beaux Arts sur le déclin de ses années, à charge à lui-même & aux autres, éprouvera un vuide affreux, n’envisageant que le spectre de l’ennui, & les ombres horribles de la mort : l’homme éclairé jouira du spectacle de sa vie passée ; il aura sçû apprécier, ce que vaut l’existence, & fort par sa pensée, il ne redoutera point l’instant inévitable qui doit terminer sa carrière : ainsi le généreux Fénélon, qui montra à l’Univers le caractère rare & sacré d’une ame remplie à la fois d’une extrême vertu & d’une extrême douceur, ne perdit point dans les Cours la simplicité de ses mœurs, & conserva dans son exil cette égalité d’ame que rien ne pût corrompre.

1711. (1842) Essai sur Adolphe

Elle était jeune et ne savait pas le nombre de ses années, et voici qu’elle a vieilli en un jour ; elle avait l’œil splendide et superbe, et sur son front rayonnaient, en caractères éclatants, ses pensées heureuses et sereines, et voici que son regard s’est voilé, que les rides anguleuses ont inscrit sur son front sa plainte et sa douleur. […] Or il n’y a pas une de ces austères vérités qui ne soit écrite dans Adolphe en caractères ineffaçables : c’est un livre plein d’enseignements et de conseils pour ceux qui aiment et qui souffrent.

1712. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre I : Des sens, des appétits et des instincts. »

Les sensations musculaires ont un double caractère affectif ou émotionnel et intellectuel ; tous deux160 en raison inverse l’un de l’autre. […] L’absence de marques déterminées, pour limiter le commencement et la fin du mouvement musculaire, laisse à notre sensation de mouvement un certain caractère vague.

1713. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre IV : La Volonté »

On peut considérer notre pouvoir sur la suite de nos pensées, comme la pierre de touche du développement volontaire dans le caractère individuel. […] Il ne constitue pas en lui-même un système de philosophie mentale proprement dite ; mais c’est une collection de faits classés pour un tel système, et présentés avec cette méthode, cette connaissance approfondie, que donne la discipline des sciences, et accompagnée de passages d’un caractère analytique.

1714. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVI » pp. 279-297

Non, rien de vulgaire ne convient à un esprit de cette distinction, à l’honnêteté de ce caractère, à la grandeur et à la noblesse du but qu’il s’est proposé. […] Il faudrait supposer madame de Maintenon une femme sans jugement et tout à fait vulgaire pour croire qu’elle ait pu être dupe d’un aussi petit esprit et d’un caractère aussi ignoble que Gobelin : et pour faire une telle supposition, il faudrait ne pas lire sa correspondance avec le directeur dont elle dirigeait les directions.

1715. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Les Confidences, par M. de Lamartine. (1 vol. in-8º.) » pp. 20-34

Heureux de formes, heureux de cœur, heureux de caractère, la vie avait écrit bonheur, force et santé sur tout mon être. […] Ici c’est le cœur qui est trop vert, plus loin c’est le caractère qui est acide.

1716. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires touchant la vie et les écrits de Mme de Sévigné, par M. le baron Walckenaer. (4 vol.) » pp. 49-62

Mme de Grignan fut la grande, l’unique passion de sa mère, et cette tendresse maternelle prit tous les caractères en effet de la passion, l’enthousiasme, la prévention, un léger ridicule (si un tel mot peut s’appliquer à de telles personnes), une naïveté d’indiscrétion et une plénitude qui font sourire. […] Elle la devait sans doute en partie à la mémoire de son oncle, à ses richesses, à ses grandes relations, mais aussi à son caractère et à son attitude : Mme de Mazarin n’est pas plus tôt arrivée en quelque lieu, dit Saint-Évremond, qu’elle y établit une maison qui fait abandonner toutes les autres.

1717. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre II. Le cerveau chez les animaux »

En effet, tout ce que nous savons des mœurs, des habitudes, des instincts propres aux poissons, nous oblige à regarder ces animaux comme généralement inférieurs aux insectes, et à les placer fort au-dessous des fourmis et des abeilles, tandis que leur système nerveux, comme celui de tous les vertébrés, offre de nombreux caractères qui le rapprochent du système nerveux de l’homme. » De cette considération, Leuret conclut, à l’inverse de Gratiolet, « qu’il ne faut pas attribuer à la forme de la substance encéphalique une très grande importance11. » Sans sortir de l’ordre des mammifères, il est très difficile d’attribuer une valeur absolue à la forme cérébrale, car s’il est vrai que le singe a un type de cerveau tout à fait semblable à celui de l’homme, en revanche, nous dit Lyell, « l’intelligence extraordinaire du chien et de l’éléphant, quoique le type de leur cerveau s’éloigne tant de celui de l’homme, cette intelligence est là pour nous convaincre que nous sommes bien loin de comprendre la nature réelle des relations qui existent entre l’intelligence et la structure du cerveau » 12. […] Commençons par ce dernier caractère, qui est le plus important et le plus controversé.

1718. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la tragédie chez les Anciens. » pp. 2-20

Il s’ensuit de là que non seulement il faut des caractères vertueux, mais qu’à la manière élevée et fière de Corneille, ils affermissent le cœur et donnent des leçons de courage. D’autres caractères, vertueux aussi, mais plus conformes à la nature commune, amolliraient l’âme et feraient prendre au spectateur une habitude de faiblesse et d’abattement.

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