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998. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Pas d’amour dans Oberman, ou du moins à peine un ressouvenir mourant d’une voix aimée, à peine une rencontre fortuite et inexpliquée près du Rhône ; puis rien, — rien, hormis les torrents de vague volupté qui débordent comme les émanations végétales des déserts. […] Une voix lointaine, un son dans les airs, l’agitation des branches, le frémissement des eaux, tout l’annonce, tout l’exprime, tout imite ses accents et augmente les désirs.

999. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Parmi les végétaux supérieurs, il s’égare volontiers sous ces arbres dont les sourds mugissements imitent la triste voix des mers lointaines ; il affectionne cette famille américaine qui laisse pendre ses branches négligées comme dans la douleur ; il aime ce saule au port languissant, qui ressemble, avec sa tête blonde et sa chevelure en désordre, à une bergère pleurant au bord d’une onde. […] « N’ayant rien à faire dans ma chambre aérienne, dit-il, je regardais par-dessus les toits, dans une maison voisine, des blanchisseuses qui me faisaient des signes ; une cantatrice novice exerçant sa voix me poursuivait d’un solfége éternel, heureux quand il passait quelque enterrement pour me désennuyer.

1000. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

Une voix grave, modérée et forte, dénonçait les abus de la monarchie française, les taches de la civilisation : elle indiquait un idéal, qui apparaissait comme absolument pratique, de gouvernement libéral et bienfaisant ; elle traduisait le sentiment de tous les cœurs en protestant contre les autodafés et contre l’esclavage des nègres. […] Dans la suite du xviiie  siècle, Montesquieu a semblé perdre du terrain ; d’autres l’ont dépassé, ont étouffé sa voix.

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