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2267. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1873 » pp. 74-101

28 janvier Je n’ai eu dans ma vie qu’une fois de la prévoyance, de la clairvoyance. […] Ce bureau de La Vie parisienne a le clair-obscur de l’appartement d’une vieille femme galante retirée du commerce des tableaux, un appartement où rutilent les chaleurs de faux chefs-d’œuvre. […] Le grand homme, tête nue, en petite jaquette d’alpaga, n’a pas froid, est plein de vie débordante. […] 29 octobre Hier soir, chez Brébant, je m’entretenais avec Robin de la persistance singulière de la vie, chez Feydeau. […] Ça été pour lui l’occasion de me reraconter une histoire qu’il m’a déjà contée plusieurs fois, l’histoire dans laquelle il risquait sa vie, au milieu des précipices d’une falaise, pour embrasser un chien de Terre-Neuve, appelé Thabor, à une certaine place, où sa maîtresse avait l’habitude de déposer un baiser.

2268. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

Elle n’y prenait pas une place à part ; elle n’avait pas su attacher aux traditions religieuses et aux fêtes nationales quelques empreintes immortelles d’imagination et d’art, ; elle n’était pas entrée dans la vie des Romains, moins poétique et moins libre que celle des Grecs : et, si elle s’était mêlée parfois à ces œuvres artificielles du théâtre que Rome victorieuse chercha comme une distraction, elle n’avait eu, sous cette forme, qu’un rôle secondaire, dont le cadre même devenait difficile et rare sous le pouvoir absolu d’Auguste. […] Que cependant l’âme de Lucrèce, que sa vive impression des spectacles de la nature et des souffrances glorieuses de Rome, que son effroi de la vie publique, son amour de la retraite et de la contemplation solitaire lui aient inspiré d’admirables accents, on ne peut le méconnaître. […] dit-on : tous ces biens de la vie, un seul jour ennemi te les enlève. » Jusqu’ici, je sens l’âme du poëte ; je jouis de sa compassion ; je bénirais en mourant son espérance, s’il en avait une à me donner. […] Ainsi raisonnent les hommes, quand, à l’alentour d’une table, souvent ils tiennent la coupe, et que, couronnant leur tête de fleurs, ils disent volontiers : Ce plaisir n’a qu’un moment pour les pauvres humains ; tout à l’heure il aura passé, et il ne sera pas permis de le rappeler jamais. » Cette fois encore un prélude avait retenti, non pas sans doute de la lyre sacrée, mais de cette corde mélancolique et douce que devait bientôt toucher Horace avec plus d’insouciance que de triste certitude, et en égayant son âme par les douceurs de la vie sans prétendre la convaincre qu’elle doit à jamais mourir. […] Ce jeune Romain, formé aux deux écoles des Grecs, nourri de la plus belle antiquité comme de la plus fine élégance, et corrigeant Callimaque par Sapho, avait, on peut le croire, une âme meilleure que sa vie et que les mœurs de son temps.

2269. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Appendice aux articles sur Roederer. (Voir page 393.) » pp. 533-543

C’est un petit épisode qui a un caractère parfait d’originalité, et qui montre, comme si l’on y était, le genre d’esprit et de vie d’un héros. […] moi. — Il faut ménager sa vie quand elle peut être utile. […] lasalle. — Oui, dans six mois d’ici, quand nous y reviendrons le général thiébault. — Te souviens-tu de la bonne vie que nous avons menée à Salamanque ? […] l’aide de camp. — Il faut que nous n’ayons fait qu’une bonne action dans toute notre vie, et nous n’avons pu échapper aux ennuis de la reconnaissance !

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