Thiers, dans son Histoire du Consulat et de l’Empire, rencontre un grand nombre de figures de généraux, de ministres, de diplomates : il les dessine avec justesse, mais en quelques traits sobres, peu marqués en général, et en évitant les saillies et ce qui ferait disparate ; en définitive, il les adoucit et les ennoblit, non pas avec la teinte d’éclat et ce lustre qu’y met Tite-Live, mais dans la même intention. […] Il excelle, quel que soit le sujet, et qu’il s’agisse de Shakespeare, de Saint-Simon, de Fléchier, de Bunyan, de Thackeray, etc., à situer (je l’ai dit) le personnage dans son époque et dans son milieu, à établir les rapports exacts de l’un à l’autre, à l’y enserrer comme dans un réseau, à rapprocher, à faire saillir coup sur coup, dans des phrases fermes et courtes qui tombent dru comme grêle, les traits et les signes visibles du talent personnel, de la faculté principale dominante qu’il poursuit et qu’il veut démontrer.
. — Sur tout sujet, en toute rencontre, on n’a pas plus de trait, de mordant. […] Pour moi, si j’ai eu le tort d’oublier la discussion de M. d’Aurevilly, c’est qu’en général, quand je le lis, je ne retiens jamais de lui que des mots ou des traits (et il en a de très fins et de très distingués, mais qui sont, par malheur, noyés dans toutes sortes d’affectations et d’extravagances).
Le trait ici s’adressait à moi, et j’ai sans doute été le seul à le ressentir. […] Rigault s’évertue, s’agite, se trémousse, se prépare de loin pour lancer un trait qui vous atteint : M.