Sous le second Empire, la musiquette d’Offenbach, leste, moqueuse, spirituelle et canaille, mène gaillardement la ronde d’une société affolée de plaisir et fait danser le cancan aux dieux, aux héros, aux grands de la terre. […] Ils se sont laissé entraîner hors des limites de leur art, sur les terres de la musique, et la poésie s’est trouvée alors transformée et même absorbée par sa voisine. […] Le règne est venu de la beauté frêle, langoureuse, éthérée qui vit les yeux levés vers les étoiles et toujours prête, semble-t-il, à s’envoler de terre. […] Les robes longues et amples, vêtements cossus et bourgeois, reparaissent dans l’entourage du roi ; et en même temps la raison, le bon sens pratique et terre à terre dominent, même dans les poèmes ; on écrit des chroniques rimées ou bien une allégorie ingénieuse qui est un traité de politique à l’usage des paysans et qui présente le gouvernement royal comme l’administration d’un bon père de famille144. […] Ils s’affublent de robes qui ont douze aunes de long ; ou bien, sautant à l’extrême opposé, ils portent des chausses collantes avec des manches qui traînent jusqu’à terre et des mahoitres, destinés à faire les épaules plus larges que nature.
C’était, en effet, un de ces livres qui épuisent les questions qu’ils traitent, — qui jettent aux choses et aux hommes la pelletée de terre sur la tête dont parle Pascal, et font dire : « En voilà, pour jamais ! […] Il l’a forcée à mettre ses deux pieds sur la terre, — plus bas que sur la terre, aux endroits où la main de l’homme a ramolli le sol et creusé quelque trou honteux. […] Ôtez le docteur Pusey et son école, qui remontent vers Rome par la science, vous n’avez plus sur cette terre des Free-Thinkers que les préjugés du xviiie siècle, passés à l’état de momies. […] L’heure du jugement était venue pour Léon X, le représentant de l’Agneau divin sur la terre, et il fut moins grand que son devoir. […] Le moment, du reste, était favorable ; la République de 1848 s’épanouissait, cette république du Paupérisme qui n’a pas encore dégoûté les bourgeois de leur idéal économique : augmenter le nombre des consommateurs sur la terre, Pour qui sentait en soi saigner l’histoire, il était presque doux de se dérober aux atteintes des spectacles qu’offrait la France.
Prié un jour par un de ses amis de Paris ou de Versailles d’être son témoin dans une affaire d’honneur, et, de plus, de lui prêter pour le combat sa terre de Belœil à la frontière de France, il s’empressa d’y consentir, et il écrivit à son intendant : « Faites qu’il y ait à déjeuner pour quatre, et à dîner pour trois. » De tels billets s’adressent moins à l’intendant qu’à la galerie. […] Un jour que la galère impériale passait tout près du rocher où la tradition place le sacrifice d’Iphigénie et comme on discutait ce point de mythologie historique, Catherine, se promenant sur le pont avec majesté, grâce et lenteur, étendit la main et dit : « Je vous donne, prince de Ligne, le territoire contesté. » On ajoute que le prince, se voyant assez près de terre, se jeta à l’eau comme il était, en uniforme, et alla prendre à l’instant possession du rocher, y gravant d’un côté, du côté apparent, le nom divin de Catherine, et de l’autre côté (assure-t-il), le nom tout humain de la dame de ses pensées, de la dame d’alors, car il en changeait souvent. […] Or, une nouvelle ère allait commencer, tout imposante et toute sévère : dans la grande convulsion démocratique où la terre de France enfanta des armées, après les premiers temps d’aguerrissement et d’apprentissage, on eut des héros, des chevaliers aussi ; mais ceux-là, les Lannes, les Murat, les Ney étaient des Achille et des Roland primitifs qui n’entendaient rien à ces grâces polies et à ces raffinements des vieux règnes. M. de Narbonne seul, comme pour en honorer le souvenir, en offrait un dernier échantillon dans l’état-major de l’empereur ; le reste était comme sorti de terre, gardant de son origine jusque sous l’or et la pourpre, ayant du lion dans le courage, génération toute faite pour la lutte des géants.