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702. (1902) Le critique mort jeune

Dans cette malédiction nous voyons spontanément, comme au premier jour où elle enivra l’esprit de l’homme vaincu par une force supérieure, s’épanouir la fleur de l’idée de justice. […] Cependant l’intelligence ainsi libérée et parvenue à ce scepticisme supérieur ne peut s’immobiliser dans la contemplation d’un spectacle où chacun, en définitive, est acteur. […] Rare succès de l’intelligence et que vient achever un art supérieur. […] Paul Bourget combat « l’abus de l’instruction » et des diplômes et a mis en roman psychologique et lettré, à l’usage de l’enseignement supérieur, la populaire « Blanchette » de M.  […] On ne va pas d’une marche si aisée, parmi une matière aussi dense que celle de ces romans, sans une souple et supérieure articulation.

703. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Ce mariage et cette mort sont très touchants, bien qu’un peu trop noyés dans la dentelle et la mousseline blanche ; c’est du pathétique mondain, très supérieur à l’agonie de madame Doche dans la Dame aux camélias. […] En somme, Lucrèce, début très supérieur aux Vêpres siciliennes, vraie tragédie de collège, était faite pour recommander aux gens de goût le nom de M.  […] Abailard a tant de génie, il est si supérieur aux autres hommes, que la femme qu’il élève jusqu’à lui par son amour échappe aux lois communes, s’illustre de sa chute et grandit en tombant ! […] Mignet et de ses Notices historiques, c’est-à-dire d’un écrivain supérieur et d’un ouvrage excellent. […] Albert de Broglie l’objet d’un travail supérieur, selon nous, l’ouvrage même et où « les sources de l’hérédité de biens dans la race humaine » sont prises de plus haut et à une plus grande profondeur.

704. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

Or, bien que l’idéal doive planer toujours un peu plus haut que la ligne de l’horizon au-dessus du réel, dans les œuvres des esprits supérieurs qui veulent faire avancer le monde social, afin qu’il y ait toujours un mieux moral posé devant les hommes pour les faire marcher à Dieu ; cet idéal ne doit jamais être tellement séparé du réel, c’est-à-dire des conditions bornées de la nature dans l’imparfaite humanité, qu’il sorte entièrement de l’ordre réel et qu’il devienne rêve au lieu de rester pensée. […] XIV « L’indifférence de ces penseurs, c’est là, selon quelques-uns, une philosophie supérieure. […] N’est-ce pas misère que d’être classé d’avance dans telle ou telle catégorie supérieure, moyenne ou subalterne, parmi cette horde humaine jetée dans un monde tout fait, où les uns s’appellent grands, les autres petits, sans qu’aucune égalité y soit possible, si ce n’est l’égalité du cercueil qui n’a que six pieds pour les uns comme pour les autres ? […] XXXI L’autre philosophie sociale est celle qui, reconnaissant aussi dans la création énigmatique telle quelle, un mystérieux fait accompli, s’y résigne comme à une justice inexpliquée, puisqu’elle est fatale, ce qui veut dire divine : semblable, j’en conviens, au prisonnier des ténèbres, qui, après avoir fait le tour de son étroit cachot, et convaincu qu’il n’y a aucune issue que par le suicide, évasion de la destinée humaine, s’y assoit à la place assignée par la Providence, y livre son corps à sa condition de souffrance et de corruption, sans murmure et sans regret, et y cherche la nourriture de son âme, qu’il sent immortelle, dans la conformité du dessein de Dieu son maître, dans le sacrifice de son bonheur à celui de ses semblables, dans la vertu, ce supplément de bonheur qui vaut mieux que lui, et dans la sainte certitude d’un destin supérieur quand cette voûte de son cachot s’écroulera sur son corps mortel pour lui laisser voir du fond du cercueil le vrai jour de Dieu !

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