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546. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

messieurs les philosophes, vous vous croyez supérieurs et vous souriez ; soyez plus vraiment philosophes encore, et consentez à voir l’homme en moralistes. […] La nomination du général Bugeaud comme gouverneur général de l’Algérie le rappelle en Afrique ; il entre aux zouaves (avril 1841), et désormais, sous les yeux du chef le plus capable, dont il est connu et apprécié, il va parcourir la seconde et décisive partie de sa carrière avec l’avantage d’être dans des emplois supérieurs dès le premier jour. […] Sous ces défauts d’une rude écorce, on sentait à tout coup l’homme de sens, mais souvent intempestif ; l’homme supérieur perçait, mais ne se dégrossissait pas. […] Je crois que, pour être général en chef, il faut être égoïste ; moi, je ne puis pas l’être ; j’aime mes soldats et je souffre de leurs maux. » Nommé par le général Bugeaud au commandement supérieur de Milianah (juin 1842), avec trois bataillons sous ses ordres, soixante cavaliers, de l’artillerie, du génie, « enfin une petite brigade, complète et organisée », il s’exerce à l’administration, à la conduite de la guerre ; il gagne en expérience, en aplomb ; il fait son apprentissage de commandant en chef : « Si jamais je suis général, j’arriverai tout formé. » Dans les expéditions qu’il dirige alentour, il y a tel petit combat « où il y a tactique en miniature et combinaison de trois armes ». […] C’est le terrain des intrigants, des esprits médiocres, des faiseurs et des phraseurs ; ce n’est pas le mien. » Une belle position d’intervalle et d’attente se présente pour lui : il est nommé au commandement supérieur de Constantine (janvier 1850).

547. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Ampère »

Chez ces autres hommes éminents que j’ai cités, une volonté froide et supérieure dirigeait la recherche, l’arrêtait à temps, l’appesantissait sur des points médités, et, comme il arrivait trop souvent, la suspendait pour se détourner à des emplois moindres. […] Mais un sentiment supérieur, le sentiment le plus cher et le plus universel de la jeunesse, manquait encore, et le cœur allait éclater. […] Outre cette vue supérieure par laquelle il saisissait le fond et le lien des sciences, M. […] S’ils se sentent pénétrés et jugés par l’esprit supérieur auquel ils ne peuvent refuser une espèce de génie, les voilà maintenus, et volontiers ils lui accordent tout, même ce qu’il n’a pas. Autrement, s’ils s’aperçoivent qu’il hésite et croit dépendre, ils se sentent supérieurs à leur tour à lui par un point commode, et ils prennent vite leur revanche et leurs licences.

548. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

« Ainsi supérieure et à la tristesse et à toute autre passion, ainsi heureuse de les avoir toutes domptées, un reste de passion suffirait toujours, non seulement pour priver l’âme de son repos, mais pour la rendre vraiment malade. […] « Et, comme toute espèce a quelque propriété qui la distingue essentiellement, aussi l’homme en a-t-il une, mais bien plus excellente ; si c’est parler convenablement, que de parler ainsi de notre âme, qui est d’un ordre tout à fait supérieur, et qui, étant un écoulement de la divinité, ne peut être comparée, l’oserons-nous dire, qu’avec Dieu même. […] « Enfin, Aristote et Théophraste, hommes supérieurs par leur pénétration et leur fécondité, ayant joint les préceptes de l’éloquence à ceux de la philosophie, je dois rappeler ici, à leur exemple, mes écrits sur l’art oratoire, c’est-à-dire les trois Dialogues, le Brutus et l’Orateur. […] Mais, en ce qui concerne la politique générale, sa théorie est une philosophie pratique tout entière, bien supérieure à celle de Machiavel, de Montesquieu, de Mirabeau, de l’Assemblée constituante elle-même. […] Ne vois-tu pas dans quelle demeure supérieure et sainte tu es appelé ?

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