Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite et fin.) […] Et ainsi, lorsque la prédication de Jésus commençait, lorsque après l’avoir vu, au retour du désert et de sa tentation triomphante, quitter de nouveau sa mère, Marie triste et résignée, on le suivait le long de la mer de Galilée allant recruter des pêcheurs pour disciples ; lorsque dans des scènes très plates et d’un langage délayé, mais assez naïves, on assistait à ces conversations, puis à ces conversions de pêcheurs, de gens de métier, chacun ayant sa physionomie et gardant assez bien son caractère ; lorsque le cortège des Douze se complétait ainsi à vue d’œil, avec sa variété, — parmi eux un seul noble, Barthélemy « en habit de prince », les autres dans leurs habits mécaniques ou de travail, saint Thomas en habit de charpentier, ayant jeté seulement ses outils, et Matthieu le publicain, à son tour, assis d’abord devant sa table, avec ses sacs d’argent rangés dessus, et cependant offrant dans sa maison un repas à Jésus qui l’accepte, — il y avait certainement, à cette suite de scènes familières, un intérêt que l’on conçoit encore très-bien aujourd’hui, et qui consistait dans l’extrême détail, dans le naturel minutieux du développement, dans l’imitation et la copie de la vie. […] Figurons-nous bien, car c’est le devoir de la critique de se déplacer ainsi à tout moment et de mettre chaque fois sa lorgnette au point, — figurons-nous donc, non pas seulement dans la salle de l’hôpital de la Trinité à Paris (cette salle me semble trop étroite), mais dans une des places publiques d’une de ces villes considérables, Angers ou Valenciennes, devant la cathédrale ou quelque autre église, un échafaud dressé, recouvert et orné de tapisseries et de tentures magnifiques, et tout alentour une foule avide et béante ; des centaines d’acteurs de la connaissance des spectateurs, jouant la plupart au vrai dans des rôles de leur métier ou de leur profession : des prêtres faisant ou Dieu le Père ou les Saints ; des charpentiers faisant saint Joseph ou saint Thomas ; des fils de famille dans les rôles plus distingués, et quelques-uns de ces acteurs sans nul doute décelant des qualités naturelles pour le théâtre ; figurons-nous dans ce sujet émouvant et populaire, cru et vénéré de tous, une suite de scènes comme celles que je ne puis qu’indiquer : — le dîner de saint Matthieu le financier, qui fait les honneurs de son hôtel à Jésus et à ses apôtres, dîner copieux et fin, où l’on ne s’assoit qu’après avoir dit tout haut le bénédicité, où les gais propos n’en circulent pas moins à la ronde, où l’un des apôtres loue la chère, et l’autre le vin ; — pendant ce temps-là, les murmures des Juifs et des Pharisiens dans la rue et à la porte ; — puis les noces de Cana chez Architriclin, espèce de traiteur en vogue, faisant noces et festins, une vraie noce du xve siècle ; — oh !
Giscon se voit arrêté au milieu de ses opérations d’arbitre ; son trésor est pillé, et lui-même avec ceux de sa suite jeté en prison après toutes sortes de traitements indignes. […] Cependant Hamilcar, sans qu’on s’explique trop comment, reprit encore une fois le dessus, et après une suite de marches et d’actions habilement ménagées, il fit si bien qu’il enferma les étrangers dans un lieu, dans une espèce de champ clos appelé La Hache, parce que le terrain offrait assez la forme de cet instrument ; il les y réduisit d’abord à une telle famine qu’ils se virent contraints de se dévorer les uns les autres ; et finalement, après s’être saisi de la personne de leurs chefs, qui étaient venus parlementer auprès de lui, il écrasa avec ses éléphants ou tailla en pièces toute cette armée, dont pas un soldat ne réchappa : elle n’était pas moindre que de quarante mille hommes. […] On pourrait croire que les raffinements de cruauté qui s’y exercèrent l’ont tenté, et qu’il y a vu une suite de scènes appétissantes pour un pinceau que la réalité, quelle qu’elle soit, attire, mais qui, tout en cherchant, en poursuivant partout le vrai, paraît l’aimer surtout et le choyer s’il le rencontre affreux et dur.
(Suite et fin.) […] « En même temps, ajoute Frédéric, on régla avec lui les contributions ; et il n’est pas douteux que les sommes qui passèrent entre les mains du maréchal ne ralentirent dans la suite considérablement son ardeur militaire43. » Le mot est terrible. […] Ce fut une suite ininterrompue d’échecs et de revers de l’Aller et du Weser au Rhin.