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681. (1936) Réflexions sur la littérature « 6. Cristallisations » pp. 60-71

Ces trois registres ont suffi sans doute à en faire un homme après tout pas malheureux. […] L’amour a sa nuit, le poids et le secret des ténèbres dont il se nourrit, et c’est la lampe de l’intelligence, la lampe sous laquelle Platon écrit le Phèdre et Le banquet, que Psyché élève sur son époux et dont une goutte de l’huile qui éclairait l’idée de l’amour suffit ici à brûler, à exiler l’amour.

682. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

Mais ne peut-on pas répondre que ces sortes d’ouvrages étant moins des monuments historiques, que des tableaux faits pour réveiller les grandes idées ou de grands sentiments, il ne suffit pas de raconter à l’esprit, il faut, si l’on peut, parler à l’âme et l’intéresser fortement ? […] Mais le nombre des idées ne suffit pas pour l’éloquence : il en fait la solidité et la force : c’est le sentiment qui en fait le charme.

683. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

Il le croit consul, sur la foi de César Auguste, le fondateur ou le restaurateur de tous les temples, qui, dans sa visite du temple de Jupiter Férétrius, dont il releva la ruine amenée par le temps, avait lu ce nom, disait-il, sur la cuirasse de lin formant partie du trophée élevé par le vainqueur : « Je me serais cru presque sacrilège187 », s’écrie l’historien flatteur, « de ne point laisser à Cossus, en preuve de ses glorieuses dépouilles, l’attestation de César, le fondateur du temple même. » De tels souvenirs, un tel langage, suffisent à nous montrer quel prestige de grandeur et de respect public pouvait encore, dans les mœurs romaines, s’attacher au zèle affecté d’Auguste pour effacer une des traces de la violence et de l’incurie destructive reprochées à la guerre civile. […] Il ne lui suffit pas, en effet, pour flatter Auguste, de redire sans cesse la paix de l’Italie, le temple de Janus fermé, et le repos du laboureur sous la garde toute-puissante de César : le poëte aspire plus haut.

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