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284. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

Le cheveu est légèrement poudré : elle porte sur la tête une pointe de dentelle noire, une sorte de petit fichu dit fanchonnette. […] Il faut savoir que cette reine, couronnée en septembre 1725 à Fontainebleau et de là installée à Versailles, n’était pas encore venue à Paris trois ans après ; elle y vint pour la première fois le 4 octobre 1728 pour une sorte de vœu ou de pèlerinage. […] Le séjour de Metz se prolongea tout un mois encore jusqu’au 28 septembre, avec toutes sortes de vicissitudes intérieures plus ou moins dissimulées. […] Là on trouve des ouvrages de tous les genres, de la tapisserie, des métiers de toutes sortes ; et, pendant qu’elle travaille, elle a la bonté de raconter ses lectures ; elle rappelle les endroits qui l’ont frappée, elle les apprécie. […] Elle l’interroge et le force de le lui nommer. « Apprenez, Monsieur, lui dit-elle, que jamais ces sortes de mots ne sauraient choquer la pudeur de mes filles, et qu’il vaut mieux jouer devant elles ces excellentes pièces que toutes les pièces à sentiments dont nous sommes inondés. » (Mémoires manuscrits de Dufort, introducteur des ambassadeurs sous Louis XV.)

285. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre premier. Les sensations totales de l’ouïe et leurs éléments » pp. 165-188

. — Énumération des principales sortes de sensations. — Ce que signifie le mot sensation. — Distinction entre la propriété du corps extérieur qui provoque la sensation et la sensation elle-même. — Distinction entre la sensation brute et la position apparente que la conscience lui attribue. — Distinction entre la sensation et l’état du nerf ou des centres nerveux. — Caractères propres et primitifs de la sensation. […] La psychologie est, par rapport à elles, comme la chimie était par rapport aux composés chimiques avant la découverte des corps simples. — Analyse des sensations de son. — Diverses sortes de sons. — En apparence, elles sont irréductibles l’une à l’autre. — Roue de Savart et sirène d’Helmholtz. — Son musical. — La sensation continue se compose alors de sensations élémentaires successives. — Cas des sons très graves. — Nous pouvons alors démêler les sensations élémentaires successives. — Chacune d’elles a une durée et passe d’un minimum à un maximum d’intensité. — Cas des sons musicaux quelconques. — Expérience de Savart. — Nombre énorme des sensations élémentaires qui se succèdent en une seconde pour former la sensation totale d’un son aigu. — Ce nombre croît à mesure que le son devient plus aigu. — En ce cas, les sensations élémentaires cessent d’être démêlées par la conscience. — Aspect que doit prendre la sensation totale. — Elle le prend en effet. — Les caractères de grave, d’aigu, de haut, de bas, de large, d’effilé, d’uni, de vibrant, que nous trouvons dans la sensation totale, s’expliquent par l’arrangement des sensations élémentaires. […] Mais ces différences importent peu, car on n’aboutit par là qu’à une sorte de revue ; on a fabriqué un casier commode, garni de cases, où l’on retrouve aisément la sensation qu’on veut considérer ; on n’a rien fait de plus. […] Nous sommes au point central de la connaissance, sorte de nœud placé entre la tige infiniment ramifiée et la racine infiniment ramifiée, enfermant dans son étroite enceinte l’origine des fibres qui, en haut, en bas, par leur multiplication et leur arrangement, constituent la plante entière. — Mais, justement parce que nos sensations sont les éléments dont se compose le reste, nous ne pouvons les décomposer comme le reste ; nous ne trouvons pas d’éléments à ces éléments. […] Il en est de même pour les groupes secondaires compris dans les groupes principaux ; toute sensation spéciale, celle de l’amer, du chatouillement, du bleu, a un maximum et un minimum au-delà desquels elle cesse ou entre dans une autre espèce. — Mais chacune d’elles est une sorte de corps simple qui, capable en lui-même d’augmentation et de diminution, ne se laisse ramener à aucun des autres.

286. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

Une fois les lourds battants feutrés retombés derrière vous, tout est fini, rien de tout cela n’existe plus : vous entrez dans un monde nouveau, dans un lieu de mystère où vous pouvez croire que la vie est un vague et mauvais rêve allégé par des trêves bienfaisantes qui font pressentir le réveil ailleurs ; et vous sortirez avec une douceur dans l’âme et une résignation un peu moins inutile que la révolte. « Venez, vous qui peinez et qui êtes chargés, et je vous soulagerai. » Mais, au lieu de gueux et de claque-patins, des messieurs, qui ont toutes sortes de raisons pour se consoler de vivre, viennent occuper les places d’abonnés, les stalles de velours en face de la chaire. […] Mort, ce candide Lacordaire — qui dans une brochure sur le pape professait le plus pur ultramontanisme et s’en allait en 1848 siéger à la Montagne, qui se drapait dans sa robe blanche avec un peu de la jactance d’un d’Artagnan monastique et se livrait en même temps, dans la crypte de son couvent aux sanglantes macérations des premiers ascètes — a continué d’exercer sur ses fils une très puissante influence qui me paraît avoir été de deux sortes : heureuse par la transmission de son généreux esprit, déplaisante quelquefois par la tradition de son éloquence aventureuse et si personnelle, qu’ils ont imitée avec quelque maladresse. […] Je sais bien que l’optique de la chaire, dans une aussi vaste basilique, exige, comme l’optique du théâtre, une sorte de grossissement ; mais la mesure me paraît quelquefois dépassée. […] J’en vois de deux sortes : celles qu’on dit, et celles qu’on ne dit pas. » La première raison que l’on dit, c’est qu’il est impossible que Dieu semble faire violence à la nature humaine et contraindre ses plus légitimes instincts. […] N’est-ce pas que je crois reconnaître dans ce signe une sorte de sacrement par lequel votre cœur vient chercher mon cœur ?

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