Lisez-le ; on aime toujours l’homme privé dans l’homme public : « Toutes les fois que j’ai songé aux meilleurs moyens d’être utile à ma patrie et de servir ainsi sans interruption les intérêts de la république, pensées qui me préoccupent souvent et longuement, rien ne m’a paru plus propre à ce dessein que d’ouvrir à mes concitoyens, comme je crois l’avoir déjà fait par plusieurs traités, la route aux nobles études. […] Le livre sixième est heureusement mieux conservé ; c’est là qu’on lit, après un entretien sur l’âme et sur ses destinées suprêmes, le songe de Scipion, excursion dans les régions éternelles. […] « Il vit Homère, en songe sans doute, parce qu’il était sans cesse occupé de ce grand poète.
Il ne songea pas à faire du pain de vie un aliment privilégié de quelques moines. […] Si vous avez vu jamais un homme mourir, songez que, vous aussi, vous passerez par cette voie. […] Est-ce la philosophie des Romains, ces bâtards du vieux monde, que Cicéron élève jusqu’aux sublimités du Songe de Scipion, et que Marc-Aurèle ravale jusqu’aux mystères de l’ascétisme ?
Dans la grande nature ils entraient éblouis, Avec ferveur, sans choix, sans art ; leur premier songé Errait émerveillé, comme la main qui plonge Dans les trésors confus par l’avare enfouis ! […] Auprès de la défense ai-je mis le désir, L’ardent attrait d’un bien impossible à saisir, Et le songe immortel dans le néant de l’heure ? […] Toute cette poésie est d’une grâce, d’un fini dans le coloris, qui fait songer à ces merveilleuses porcelaines où des roses qui ravissent s’allient à des bleus d’une douceur de rêve.