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427. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

Voilà pourtant l’homme à qui la poésie et l’éloquence ont prodigué les panégyriques pendant un siècle. […] Il ne sera pas mis non plus parmi ces grands hommes d’état nés pour être conquérants et législateurs, puissants par leur génie, grands par leur propre force, qui ont créé leur siècle et leur nation, sans rien devoir ni à leur nation ni à leur siècle : cette classe des souverains n’est guère plus nombreuse que la première ; mais il en est une troisième qui a droit aussi à la renommée : ce sont ceux qui, placés par la nature dans une époque où leur nation était capable de grandes choses, ont su profiter des circonstances sans les faire naître ; ceux qui avec des défauts ont déployé néanmoins un esprit ferme et toute la vigueur du gouvernement, qui, suppléant par le caractère au génie, ont su rassembler autour d’eux les forces de leur siècle et les diriger, ce qui est une autre espèce de génie pour les rois ; ceux qui, désirant d’être utiles, mais prenant l’éclat pour la grandeur, et quelquefois la gloire d’un seul pour l’utilité de tous, ont cependant donné un grand mouvement aux choses et aux hommes, et laissé après eux une trace forte et profonde.

428. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Andrieux »

Andrieux, sa véritable spécialité, au milieu de cette gaie et douce amitié qui l’unissait à Ducis, Collin et Picard, c’était d’être leur juge, leur conseiller intime, leur Despréaux familier et charmant, l’arbitre des grâces et des élégances dans cette petite réunion, héritière des traditions du grand siècle et des souvenirs du souper d’Auteuil. […] Andrieux, qui n’eut jamais rien de commun avec l’Allemagne que d’être né dans la capitale alsacienne, et qui faisait fi de tout ce qui était germanique, avait moins de répugnance pour la littérature anglaise, et il la posséda, comme avait fait Suard, par le côté d’Addison, de Pope, de Goldsmith, et des moralistes ou poëtes du siècle de la reine Anne. […] Andrieux est mort, content de laisser ses deux filles unies à deux hommes d’esprit et de bien, content de sa médiocre fortune, de sa grande considération, content de son siècle, content de voir la Révolution française triomphante sans désordres et sans excès. » M. 

429. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre Premier »

Poison et potion ; on appelle doublets ces mots de forme différente et de souche unique  ; le second est venu doubler le premier soit à une époque assez ancienne, soit au cours des siècles ou tout récemment. […] Cet apport, continué par les siècles, a presque submergé le vieux français. […] Le mal que ce petit livre a fait depuis deux siècles aux langues novo-latines est incalculable et peut-être irréparable.

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