Un courage intrépide Vous distingue personnellement entre tous les braves, mais ce courage est dirigé par une bonté non moins sublime ; le sang des guerriers, les pleurs du pauvre, les inquiétudes même du faible sont l’objet de Votre humanité prévoyante. […] Le martyr sert la cause de la vertu en livrant son sang pour l’enseignement du monde : celui qui se rend coupable du Suicide pervertit toutes les idées de courage et fait de la mort même un scandale. […] Mais se fortifier par sa propre pensée, au milieu des revers de la vie ; se faire un appui de soi contre soi, en opposant le calme de sa conscience à l’irritation de son caractère : voilà le vrai courage auprès duquel celui qui vient du sang est bien peu de chose, et celui qu’inspire l’amour-propre, encore moins. […] Je croyais, je vous l’avoue, que l’intention de Marie était de m’épouvanter par cette sentence, mais je n’imaginais pas qu’elle voulût répandre mon sang qui est aussi le sien. […] qu’y a-t-il de plus violent, s’écria notre ami, que cette mort sanglante… — Le sang des martyrs, lui répondis-je, n’est-il pas un baume pour les blessures des infortunés ?
Défié par le formidable génie saxon, qui l’attirait et faisait pétiller son vieux sang normand, il prit corps à corps le terrible texte de Shakespeare, et il y trouva un Hastings… en sens inverse. […] Fils de ce poète exagéré, mais grand, qui, espagnol par le génie et par la moitié de son sang, et infidèle à l’un et à l’autre, semble présentement un contre-sens dans l’ordre de l’intelligence et fait l’effet du Cid qui aurait renoncé à la croix, François Hugo, dans son orgueil filial, dut croire que ce grand romantique Shakespeare était un peu de ses ancêtres, et il se mit à le traduire dans la langue renouvelée par son père, et, transmission mystérieuse en laquelle je crois ! […] L’éclat de ce rose charmant, fait avec du sang, étendu dans des larmes, n’a pas échappé à l’œil de Coleridge, qui a signalé, comme un poète, l’œuvre du poète, ici le plus adorable de tous : « Roméo et Juliette, — dit-il, — ce n’est que printemps et jeunesse ! […] Voici Tybalt, le fougueux Tybalt, qui est, lui, la poésie du Sang, — du Sang qui demande à couler !
Dans ces choses sans nom il y a du sang de tigre et des larmes de chien sans maître. […] La Douleur est l’essence même du beau en poésie et la Poésie est une porphyrogénète née dans la pourpre du sang du cœur des poètes. […] Les tumultes cachés du cœur, les contradictions de la pensée, les angoisses les plus terribles, tout ce qui traîne d’épouvante dans les chemins de la vie, tout cela est résolu par l’effusion du sang d’UN SEUL que l’enthousiasme de son amour a dévoré jusqu’à la mort. […] Et lorsque cet éphémère et tous ses pareils, avec lui, ont croulé comme des chapiteaux de nuées derrière le prochain horizon, on ne sait déjà plus si l’étrange lueur pourprée qu’ils ont un instant répandue était leur propre sang ou bien de la lumière ! […] En attendant que le Caïn de la bêtise perde l’habitude d’égorger ses aînés, le sang d’Abel continue de crier vers Dieu ; il s’élève un peu plus chaque jour, il s’enfle et grossit lentement comme une nuée de tempête et de destruction.