Durant quatre années, j’ai été chargé de la critique dramatique, d’abord au Bien public, ensuite au Voltaire. Sur ce nouveau terrain du théâtre, je ne pouvais que continuer ma campagne, commencée autrefois dans le domaine du livre et de l’œuvre d’art. Cependant, mon attitude d’homme de méthode et d’analyse a surpris et scandalisé mes confrères. Ils ont prétendu que j’obéissais à de basses rancunes, que je salissais nos gloires pour me venger de mes chutes, parlant de tout, de mes œuvres particulièrement, à l’exception des pièces jouées. Je n’ai qu’une façon de répondre : réunir mes articles et les publier.
M. Saint. […] L’esprit littéraire est gardé dans cette arche sainte avec un déploiement de commérages dont nous sourions aujourd’hui.
. — Les résultats de la critique biblique y apparaissaient pour la première fois dégagés de tout le pédantisme dont on les enveloppait en Allemagne ; — l’histoire « sainte » s’y trouvait ramenée au caractère purement humain de toutes les histoires ; — et à la personne du Dieu des évangiles une autre personne était substituée ; — réelle, et non plus symbolique, ou « mythique » comme le Jésus de Strauss et des théologiens allemands. — Que ces caractères se retrouvent dans la suite entière des Origines du christianisme, 1863-1881 ; — mais qu’à mesure que l’ouvrage avance vers son terme, — la critique de Renan y ressemble davantage à celle de Voltaire ; — par une certaine déloyauté qui s’y mêle à l’interprétation des faits ; — un réel mépris d’une humanité qu’on ne conduirait même à son bien qu’en la trompant ; — et une affectation de légèreté tout à fait discordante à la gravité du sujet. — Quelques-unes des qualités de l’auteur des Études d’histoire religieuse y persistent ; — son art d’éveiller d’un mot tout un monde d’idées ; — la clarté de son style ; — et une aisance qu’il ne faut pour en sentir tout le prix, que comparer au dur éclat de la prose de Taine. — Mais déjà, dans les derniers volumes, le dilettantisme commence, d’apparaître ; — c’est-à-dire la disposition d’esprit la plus fâcheuse qui soit pour un historien ; — en tant qu’elle consiste à ne voir dans son sujet qu’une occasion d’en jouir soi-même ; — et d’y faire briller les grâces de son esprit.