Laboulaye, l’estimable introducteur et commentateur, qui se plaît à retrouver dans ces écrits ses principes et sa propre doctrine, est un homme de l’école américaine, à prendre le mot dans le meilleur sens ; il est sincèrement d’avis que la liberté en tout, le laisser dire, le laisser faire, le laisser passer, est chose efficace et salutaire ; qu’en matière de religion, d’enseignement, de presse, d’industrie et de commerce, en tout, la liberté la plus entière amènerait les résultats en définitive les meilleurs, et que le bien l’emporterait sur le mal ; il pense que cela est également vrai chez toute nation civilisée et à tous les moments. […] En religion, par exemple, M. […] Ce fameux ouvrage sur la Religion, préparé pendant vingt ans, fît long feu. […] Voici une de ses phrases fameuses et du petit nombre de celles qu’on retient ; il parle, dans la préface de son livre sur la Religion, contre le principe moral de l’intérêt bien entendu : « Son effet naturel, dit-il, est de faire que chaque individu soit son propre centre. […] Tous deux s’occupent de religion, pour la remettre en honneur et en vogue.
La théosophie, c’est-à-dire l’esprit intelligent et intime des religions, s’égara, tarit comme une eau hors de son calice, ou bien se réfugia dans quelques cœurs et s’y vaporisa en mystiques nuées. […] Et pourtant les âmes tendres, élevées, croyant à l’exil de la vie et à la réalité de l’invisible, n’avaient pas disparu : la religion, sous ses formes rétrécies, en abritait encore beaucoup ; la philosophie dominante en détournait quelques-unes, sans les opprimer entièrement ; mais toutes manquaient d’organe général et harmonieux, d’interprète à leurs vœux et à leurs soupirs, de poëte selon le sens animé du mot. […] Regarde-toi au milieu de ces secrètes et intérieures insinuations qui stimulent si souvent ton âme, au milieu de toutes les pensées pures et lumineuses qui dardent si souvent sur ton esprit, au milieu de tous les faits et de tous les tableaux des êtres pensants, visibles et invisibles, au milieu de tous les merveilleux phénomènes de la nature physique, au milieu de tes propres œuvres et de tes propres productions ; regarde-toi comme au milieu d’autant de religions ou au milieu d’autant d’objets qui tendent à se rallier à l’immuable vérité. Pense avec un religieux transport que toutes ces religions ne cherchent qu’à ouvrir tes organes et tes facultés aux sources de l’admiration dont tu as besoin… Marchons donc ensemble avec vénération dans ces temples nombreux que nous rencontrons à tous les pas, et ne cessons pas un instant de nous croire dans les avenues du Saint des Saints. » N’est-ce pas un prélude des Harmonies qu’on entend ? […] Il y a bien de la grandeur dans son volume de 1820 ; il est merveilleusement composé sans le paraître ; le roman s’y glisse dans les intervalles de la religion ; l’Élégie éplorée y soupire près du Cantique déjà éblouissant.
Dans sa litière, où cette infatigable voyageuse passa la moitié de son existence, elle travaillait, conversait, dictait : vers ou prose, chant, drame ou récit, religion ou galanterie, mythologie ou réalité, toute forme et tous sujets lui étaient bons. […] Elle n’était pas protestante : elle ne songea jamais à rompre l’unité ; mais sa foi avait de trop vives sources pour s’accommoder de la sécheresse des scolastiques ; elle engageait dans sa religion de trop nobles aspirations intellectuelles et morales pour ne pas mépriser l’ignorance et la brutalité des moines. […] La religion en somme était pour elle affaire de haute culture et d’active spontanéité. […] Sa religion était une spéculation comme pour d’autres le plalonisme ou le péripatétisme. […] Lanson, Clément Marot, Revue suisse, déc. 1882 (sur la religion de C.