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743. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean de Meun, et les femmes de la cour de Philippe-le-Bel. » pp. 95-104

Raison est celui de le Meun, & Noble-vouloir, celui des dames. […] Raison, parlant ensuite pour le Meun, l’excuse sur ses bonnes intentions ; sur ce qu’il en veut moins aux femmes qu’il a toujours fort aimées, qu’aux maris qui plus d’une fois l’ont maltraité ; & à la jalousie, ce monstre si odieux au sexe. […] Clopinel, voyant que ses excuses & raisons n’avoient lieu contre leur rage, supplia humblement, qu’avant mettre leur ire à exécution, il plût à la reine lui octroyer une requête ; ce qu’il obtint avec grande difficulté.

744. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 33, de la poësie du stile dans laquelle les mots sont regardez en tant que les signes de nos idées, que c’est la poësie du stile qui fait la destinée des poëmes » pp. 275-287

L’écrivain le plus austere, celui qui fait la profession la plus serieuse de ne mettre en oeuvre pour nous persuader que la raison toute nuë, sent bientôt que pour nous convaincre il nous faut émouvoir, et qu’il faut pour nous émouvoir mettre sous nos yeux par des peintures les objets dont il nous parle. […] Mais qu’on ne s’attende point à voir dans son discours une précision seche qui écarte toutes les figures capables de nous émouvoir et de nous séduire, ni qui se borne aux raisons concluantes. […] La rhetorique qui veut persuader notre raison, doit toujours conserver un air de moderation et de sincerité.

745. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 24, objection contre la solidité des jugemens du public, et réponse à cette objection » pp. 354-365

Vous mettez tout le monde en droit de leur faire leur procès, même sans rendre aucune raison de son jugement, au lieu que les autres sçavans ne sont jugez que par leurs pairs, qui sont encore tenus de les convaincre dans les formes avant que d’être reçus à prononcer leur condamnation. […] Ainsi les poëtes loüent avec raison le poëme de Lucrece sur l’univers, comme l’ouvrage d’un grand artisan, quand les philosophes le condamnent comme un livre rempli de mauvais raisonnemens. […] L’ignorant peut donc dire que l’ouvrage est bon ou qu’il ne vaut rien, et même il est faux qu’il ne rende pas raison de son jugement.

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