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690. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — VII »

Ce regard singulier, avec quelque chose de retourné en dedans, pas très net, un peu brouillé, vraiment d’un homme qui voit des abstractions, et qui doit se réveiller pour saisir la réalité, contribuait à lui donner, quand il causait idées, un air de surveiller sa pensée et non son interlocuteur, et ce défaut devenait une espèce de beauté morale.

691. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

Il ne traite pas son thème à la mode lyrique : s’il abonde en descriptions, en images, en ornements, il est sensible qu’il vise déjà surtout à noter, à détailler, à expliquer des faits moraux, qu’il traite comme des réalités. […] Moins lourde, mais plus sérieuse fut l’imitation française : la société précieuse est la réalité dont l’Astrée donne le roman. […] Comme la sociabilité a formé et lie toujours le monde, la distinction est un art de plaire ; tout ce qu’on a en soi et sur soi, réalité solide ou surface, il faut l’avoir pour les autres, ou s’en donner l’air : cette coquetterie de parure par laquelle la beauté semble faire don de soi au public, et prendre intérêt à son plaisir, quand il s’agit de la pensée et de l’expression de la pensée, c’est l’esprit.

692. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

Cette charognade à la Baudelaire, que Baudelaire aurait faite plus courte, cette charognade, calquée à la vitre de la plus immonde réalité et avec des détails qu’un grand peintre aurait oubliés dans l’intérêt de sa peinture, voilà donc tout ce que peut nous donner à présent un homme qui se croit plus qu’un Michel-Ange et qui n’est pas même un Goya ! […] il y a plus beau dans la réalité et dans l’Histoire, et l’aveugle artiste, plus aveugle qu’Homère, ne s’en souvient donc pas ! […] Ils ne découpent pas des silhouettes sans profondeur et sans réalité dans des hommes de l’intensité de Robespierre, de Danton, de Marat.

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