/ 2619
564. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

« Mais ce sommet est préparé par tout ce qui précède, et la question de matière pure ou de principe incorporé dans la matière est la même à tous les degrés de l’échelle. […] « Abordons franchement la question. » XX « Ces deux états, l’un de pure matière, l’autre de pur esprit, sont aussi étrangers l’un que l’autre à la nature humaine, formée de leur concours et non de leur exclusion. […] « Et c’est cette violence faite à la nature des choses, à la nature bi-substantielle de l’homme et de tous les êtres de notre univers, qui a causé l’erreur, également déplorable, du matérialisme, qui confond la vie avec son support, et du mysticisme, qui prétend se passer de ce support, et qui s’égare dans les fictions de l’esprit pur. « Le matérialisme, en effet, n’est arrivé à cette conception de matière pure que par l’abstraction, c’est-à-dire par la séparation graduelle de toutes les qualités ou propriétés qu’on observe aux divers degrés de l’échelle des êtres.

565. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Edgar Allan Poe  »

Qu’il se propose de faire concevoir la monomanie d’une intelligence analytique pure, la niaiserie d’un stupide enquêteur, la vacillation d’une âme malade incitée à consommer sa perte et prise entre le souci de sa chair et une irrésistible impulsion morbide, l’affolement d’une frénétique terreur, ces états crépusculaires de l’esprit où le cerveau anémié n’a plus que des remuements lents et des pensées moribondes, la pénétration psychologique de Poe s’exerce par la même méthode de démonstration détaillée. […] Les âmes qui luisent dans les yeux aigus des personnages sont concises, extraites, sublimées en essences spirituelles pures. […] D’éclatantes corolles aux nuances spectrales, se creusant en cônes et se découpant en angles volutés, s’infléchissent par courbes pures sur leurs tiges d’abord verticales. […] Cet élément de curiosité pure qui constitue les romans judiciaires et le Scarabée, s’atténue mais persiste dans la série de récits allant de Hans Pfaal aux poèmes en prose et en vers. […] Ceux-ci sont employés à exciter dans l’âme du lecteur un double courant d’émotions associées comme deux fils entrelacés et alternants : l’une la curiosité pure de l’analyste, l’autre la terreur du visionnaire, qui, de moins en moins matérielle va du spectacle de la mort à celui des désorganisations cérébrales les plus subtiles, pour s’élever aux passions idéales et graves des poèmes.

566. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES FRAGMENTS ET LETTRES DE BLAISE PASCAL, Publiés pour la première fois conformément aux manuscrits, par M. Prosper Faugère. (1844). » pp. 193-224

Le côté même sérieux de ces discussions ne sortait pas du pur domaine de l’esprit. […] M. de Schlegel caractérise dignement les beautés pathétiques et pieuses de cette scène : « Nous voyons, dit-il, la majesté immortelle auprès de la jeunesse expirante, les déchirements du repentir auprès des émotions d’une âme pure. Diane montre pour les maux des humains toute la pitié qui est compatible avec son essence divine ; mais il y a néanmoins dans ses paroles je ne sais quelle empreinte d’une sérénité céleste… Il faudra bien convenir ici que les Anciens ont quelquefois deviné les sentiments chrétiens, c’est-à-dire ce qu’il y a de plus aimant, de plus pur et de plus sublime dans l’âme. » En adhérant aux observations exquises de l’excellent critique, j’avouerai pourtant qu’une chose m’a frappé, au contraire, en lisant ce morceau, en assistant à cette intervention compatissante de la plus chaste des divinités : c’est combien on est loin encore du christianisme, je veux dire du Dieu fait homme et mort pour tous. […] Et voilà précisément à quoi j’en voulais venir ; les Pascal, les Rancé, ces purs et francs chrétiens, croyaient avant tout à Jésus-Christ dans le christianisme, à un Dieu-homme ayant exactement souffert comme eux et plus qu’eux, ayant sué la sueur d’agonie dans tous ses membres, et l’essuyant de leur front : de là leur force.

/ 2619