Ce bizarre et laborieux problème ne suffisait pas encore à ses desseins ; pour mieux prouver sa force, il choisit le sujet le plus ardu, et, se rappelant sans doute que l’auteur des Martyrs avait devancé dans son œuvre quelques-unes des conquêtes où s’est signalée la rénovation de l’histoire au xixe siècle, il se dit qu’il devancerait aussi les conquêtes de l’archéologie la plus récente, les recherches encore inachevées de la haute érudition sémitique, … opera interrupta, minaeque murorum ingentes . […] Bien plus, il exagérait ses procédés, voulant prouver à tous qu’il ne faisait pas de concessions aux bourgeois — encore un mot de Goethe, mais que l’auteur de Faust appliquait en poète et dans un esprit tout différent.
Nous pouvons, pendant que nous percevons du blanc, imaginer du rouge, mais non percevoir du rouge ; cela prouve que l’image a son milieu cérébral et mental différent de la perception complète. […] Ce qui prouve que la reconnaissance est bien un jeu tropique intérieure produit par des opérations appétitives et sensitives, c’est que la mémoire, dans la reconnaissance des idées comme dans les autres actes, est sujette à des illusions et à des maladies.
C’est le privilège de l’art que de ne rien démontrer, de ne rien « prouver », et cependant d’introduire dans nos esprits quelque chose d’irréfutable83. […] S’il y avait au-dessus de la Nature des êtres supérieurs et vraiment divins, — un Dieu, des dieux ou des anges, — ils n’auraient qu’un moyen de prouver leur divinité : descendre pour partager nos souffrances, nous aimer pour ces souffrances et même pour nos fautes.