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1996. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

trois siècles trop tôt, assistât vivant à la scène diplomatique que nous avons sous les yeux, et qu’interrogé par les Italiens ses compatriotes sur le meilleur parti à prendre pour régénérer l’Italie, il prît la parole à Naples, à Rome, à Bologne, à Venise, à Milan, à Turin, soit dans un conseil de diplomates italiens délibérant en famille sur les affaires de la grande nation qui veut revivre, soit dans une de ces tribunes que l’esprit moderne relève au milieu des peuples longtemps muets. […] Que dirait le monde, par exemple, si la Suisse prenait tout à coup le caprice de s’annexer à la France ou de s’annexer à l’Autriche ? […] Elle prendrait, direz-vous, la Savoie et le comté de Nice, et elle ferait bien ; mais l’annexion de ces deux parcelles de peuple suffirait-elle réellement à la sécurité de la France contre une maison de Savoie possédant demain trente millions d’hommes en Italie ? […] Maintenant l’Angleterre, par la protection habile et personnelle qu’elle prête à la maison de Savoie pour la flatter d’une monarchie piémontaise universelle en Italie, l’Angleterre va prendre en Italie, pour la première fois depuis que le monde existe, la position qu’elle avait prise en Espagne contre les Français. […] Le Piémont aura sa grande et honorable place qu’il a achetée de son sang dans l’Italie subalpine, mais il ne prendra pas la place de l’Italie tout entière.

1997. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Je n’en sais rien : qui peut dire où l’emportera le souffle qu’il a dans la poitrine, quand il aura pris confiance dans son talent et qu’il chantera à pleine haleine ce qu’il gazouille aujourd’hui à demi-voix ? […] Il écrit, à ce que disent ses amis, un poème épique familier dont la vie privée, sans aventures et sans merveilleux, sera le sujet, poème qui ne prendra son intérêt que dans les lieux, les choses, les impressions qui nous enveloppent tous et tous les jours : l’épopée du coin du feu. […] je poursuis seul notre pèlerinage Aux grands maîtres vivants ou morts que nous aimons ; Guidé par un poète, un ami de mon âge, J’ai pris l’âpre chemin des pâtres sur les monts. […] À l’appel du soleil on se lève soudain ; Le corps prend sa fraîcheur, l’âme son innocence, Dans cet air transparent et vierge du jardin. […] C’est Joseph Autran, qui depuis a pris tant et de si larges et de si hautes places dans la littérature poétique de nos jours.

1998. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 5-64

Merci de m’avoir logé et nourri tout un jour si honnêtement, comme vous avez fait ; le bon Dieu prendra bien soin de la nuit. […] Elle séparait la maison du bargello de la petite cour profonde et étroite de la prison, sur laquelle les cachots grillés des détenus prenaient leur jour. […] Mais je ne disais pas mon pays ni la raison qui m’avait fait prendre un habit d’homme, ni le meurtre d’un sbire qui avait fait jeter mon cousin dans quelque prison. […] craindrais-tu de prendre service chez nous parce que nous sommes geôliers de la prison du duché, dont tu vois la cour par cette fenêtre, et parce que le monde méprise, bien à tort quelquefois, ceux qui portent le trousseau de clefs à la ceinture, pour ouvrir ou fermer les portes des malfaiteurs ou des innocents ? […] lui dit-il, c’est l’heure du déjeuner des prisonniers, prends ta corbeille et apporte-leur, derrière moi, leur provende !

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