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1440. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

C’étaient là pour le public des étrennes tout autres que le conte d’Acajou publié l’année d’auparavant : elles ne prirent pas moins bien. […] » ce portrait est très agréable chez Duclos, mais il est pris tout entier de l’abbé Le Grand, qui ne fait que l’étendre un peu plus, et y mêler de ses longueurs et de sa bonhomie d’expression. […] Il y a une autre scène où Duclos prend avec Saint-Simon des libertés de forme et se permet des variantes de ton qui ne sont pas d’un narrateur assez scrupuleux. […] Louis XIV, tout à la fin de sa vie, s’était pris de goût et d’amitié pour une demoiselle de Chausseraye (ou de La Chausseraye), qui avait de l’esprit qu’elle cachait sous un air d’ingénuité. […] Elle en dit tant, et avec un air si simple, si indifférent sur les partis et si touchant sur l’intérêt qu’elle prenait au roi, qu’il lui répondit qu’elle avait raison ; qu’il suivrait son conseil en tout ce qu’il pourrait là-dessus, parce qu’il sentait que ces gens-là le feraient mourir… Or, que fait Duclos ?

1441. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Benjamin Constant. Son cours de politique constitutionnelle, ou collection de ses divers écrits et brochures avec une introduction et des notes, par M. Laboulaye »

Les républicains n’ont pas pris le change : si quelques droits précieux ont été passagèrement suspendus, si quelques formes ont été violées, si quelques parties de la liberté ont été froissées, nous en accusons le royalisme ; c’est lui qui nous a poussés dans ces défilés où le danger semblait motiver l’oubli momentané de la loi. […] Si ce régime s’était affermi, il allait le servir, y prendre son rang ; il devenait un homme de gouvernement, et ce rôle d’opposition perpétuelle, qui fit en quelque sorte partie de son caractère, n’était plus le sien. […] Napoléon n’a ni colère ni rancune ; il prend les hommes pour ce qu’ils sont, selon leur utilité réelle et leur aptitude à la chose présente, selon qu’ils peuvent se prêter et servir à son dessein du moment. […] L’astre de Mme de Staël décida absolument du parti qu’il prit à l’époque du Consulat et dans les années suivantes : il vivait dans son cercle et se mouvait dans son tourbillon. […] Tous deux laissent prendre dans leur vie publique une trop grande part, et trop visible, à l’influence des femmes ; mais Chateaubriand, tout en y cédant, les dévore, et Benjamin Constant, des deux, est le plus entraîné et le plus mené.

1442. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Saumaise en prit des copies qui circulèrent dans le monde savant et furent longtemps la friandise des plus doctes. […] Léonidas le nie spirituellement et s’inscrit en faux dans ce petit dialogue : « Un jour l’Eurotas dit à Cypris : « Ou prends des armes, ou sors de Sparte : la ville a la fureur des armes. » Et elle, souriant mollement : « Et je serai toujours sans armes, dit-elle, et j’habiterai Lacédémone. » Et Cypris est restée sans armes, et après cela il y a encore d’effrontés témoins qui viendront nous conter que chez eux la déesse est armée. » Comme variété de ton, je noterai une piquante épigramme dans un sens ironique et de parodie : il s’agit d’un philosophe rébarbatif, d’un laid cynique, Posocharès, qui s’est laissé prendre aux filets d’un jeune objet charmant ; et celui-ci, comme on fait d’un trophée après une victoire, se complaît à suspendre dans le temple de Vénus toute la défroque du cynique, son bâton, ses sandales, « et cette burette crasseuse, et ce reste d’une besace aux mille trous, toute pleine de l’antique sagesse. » Ceux qui savent leur Moyen-Age peuvent rapprocher cette épigramme du fabliau connu sous le titre du Lai d’Aristote. […] Il y a même pour les morts, il y a de ces bonnes grâces mutuelles, et qui sont chères encore à ceux qui ne sont plus. » Il semble qu’il y ait eu quelque réminiscence de ce vœu pastoral et une observance des rites voulus, dans les funérailles que l’aimable Daphnis et son amie Chloé célébrèrent en l’honneur du bouvier Dorcon, et auxquelles le troupeau lui-même, errant et mugissant, sembla prendre sa part. […] « On a renversé le panier : aux délicats maintenant de reconnaître dans la mêlée les cerises du dessus. » C’est encore ce que m’écrit, après avoir lu le présent article et en se ravisant, le spirituel correspondant dont on vient de voir les craintes, et que je prends sur moi de nommer, M.  […] Dans l’épigramme originale, le villageois ne prend pas ce détour de traire la brebis dans un vase d’argile pour en arroser ensuite la tombe : il amène directement la brebis mère sur le tertre funéraire, et soulevant la mamelle [texte grec]; tenant haut le pis (expression d’un pittoresque rustique), il fait jaillir le lait sur la terre même.

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