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361. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Tallemant des Réaux »

Un divorce effroyable séparait le peuple et la noblesse. […] Il écrit partout dans son livre : les gens du peuple et les gens du monde comme si les gens du peuple n’étaient pas du monde, et les gens du monde n’étaient pas du peuple ! […] Saint-Bonnet a dit avec son beau style lapidaire : « Triste récit en trois mots : le roi a corrompu la noblesse, « la noblesse a corrompu la bourgeoisie, la « bourgeoisie a corrompu le peuple. » On n’en était pas là encore, mais on partait pour y arriver.

362. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de la Révolution » pp. 73-87

Quand on s’appelle Michelet, et quand on a fait un livre dans lequel on a poussé le panthéisme historique jusqu’à dépouiller de leur personnalité les chefs de la Révolution française au profit du peuple anonyme et de la chose révolutionnaire, pourquoi l’inconséquence d’un livre intitulé : Les Femmes de la Révolution ? […] Selon Michelet, c’est la masse acéphale, c’est le peuple obscur, qui l’emporte sur tous les états-majors de la Révolution, en instincts, en vertus, en dévouements, et, qu’on nous passe le mot ! en spiritualité révolutionnaire ; c’est le peuple qui est le vrai chef dans cette terrible campagne contre les principes éternels des sociétés et contre Dieu ; c’est le peuple qui est le grand, et, de fait, l’unique acteur de ce vaste drame, le bourreau masqué de sa masse même, comme le bourreau de Whitehall l’est de son voile noir ! […] pour nous aussi, le peuple est tout dans ce renversement d’une société.

363. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

A Rome même, vous le savez, il y avait une grandedifférence entre le latin fixé par la culture littéraire, le latin de Cicéron et de Pline le Jeune, et celui que parlait la populace des faubourgs, le peuple des campagnes. […] On sait par saint Augustin que de son temps le peuple disait floriet pour florebit et ossum pour os. […] « Dans les vallées des Pyrénées occidentales, persistait l’ancien idiome aquitain, qui avait pris le nom de basque, aussi bien que le peuple qui le parlait. […] Il inventa réellement l’idéal d’une langue romane intermédiaire, la même et commune chez tous les peuples de langues néo-latines, chez les Français, les Provençaux, les Italiens, les Espagnols, les Portugais, et qui se serait interposée, à l’origine, entre le latin et la langue propre à chacun de ces peuples. […] et vous tous dont l’idiome vulgaire se rattache aux idiomes de ces peuples, vous êtes sans doute surpris et charmés des identités frappantes, des analogies incontestables que vous découvrez sans cesse entre vos langages particuliers.

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