« Dévoiler par la plus savante critique les secrets de l’histoire, de la chronologie, de la culture, de l’état politique, moral, religieux, des peuples et des lieux où s’est passée la scène des événements de l’Ancien Testament, voilà, lui disait Villers, la tâche qu’ils ont remplie, et qui est un peu plus intéressante que vous ne semblez le croire. […] Il en est résulté un livre où tout est neuf, et que les littérateurs et les historiens se disputeront, parce qu’il offre à ceux-là un monument poétique de la plus grande originalité, et à ceux-ci des documents authentiques sur un peuple inconnu, que l’Europe vient de découvrir au milieu de la Méditerranée. […] Les relations compliquées de ce peuple avec les Aquitains et les Vascons des frontières sont traitées pour la première fois d’une manière lucide, intelligente ; les effets lointains des révolutions arabes intestines et leur contre-coup sur la lutte engagée contre les Franks se marquent avec suite et s’enchaînent : il est telle révolte des Berbères en Afrique qui, seule, peut expliquer de la part des Arabes d’Espagne un temps d’arrêt, un mouvement rétrograde, où les chroniqueurs chrétiens n’ont rien compris. […] On croit, grâce à lui, saisir le sens de cette horrible boucherie ; on comprend quelques-uns des motifs généraux qui ramassaient là, à un jour donné, tant de peuples ; on a enfin l’idéal d’une bataille, selon les idées des Franks, dans ce gigantesque duel d’une terrible simplicité. […] « L’apparition d’Anaxagore à Athènes est un événement très-analogue à l’ambassade de Carnéade à Rome, par les conséquences qu’elles eurent pour la culture de l’un et l’autre de ces peuples. » 61.
Il est une bonne et forte école pour le peuple des lecteurs. […] Ce peuple est aussi catholique que les Arabes de la Mosquée sont musulmans… Les madones m’ont vaincu ; j’ai trouvé dans ce peuple, dans sa foi, dans sa civilisation, une hauteur, une poésie, une idéalité incomparable. […] Il n’est pas probable que ce soit chez Taine ou Renan qu’il faille chercher la pensée du peuple français, ou un renseignement historique sur l’état d’âme du peuple français en 1890, mais bien dans le Petit Journal. […] Le Français est le seul peuple du monde qui ait ce singulier goût ; mais il est chez lui extrêmement fort. On ne peut aller trop loin, en France, dans l’expression du mépris à l’égard du peuple français.
Puissent donc les poètes, comme au temps de Rousseau, ressusciter encore la sensibilité des peuples assoupis. […] ne laissons pas le peuple en proie aux vulgaires déclamations des démagogues, mais marchons à sa rencontre, en chantant, avec des gerbes plein les bras. […] Je voudrais les voir tirés à des milliers d’exemplaires, je voudrais les entendre bercer l’âme enfantine et puissante du peuple. […] Lisez la suite de ces poèmes, et convenez avec moi qu’ils possèdent un cachet exotique, qu’ils sont bien un produit de l’esprit hellène, comme il est de nos jours, depuis qu’il s’est transformé par suite du commerce des peuples asiatiques. […] Des peuples ne naîtront pas au bruissement de sa voix ; des héros ne seront pas ensemencés par sa parole ; les fleurs de ses métaphores ne sont que factices et cristallisées, infécondes et monstrueuses ; nul grain divin n’en mûrira.