Mais il n’imagine cet état heureux et parfait qu’en attribuant à ce qui est privé de mouvement, à ce qu’il formule éternellement semblable à soi-même, les propriétés et les passions de ce qui est en mouvement incessant sous l’aiguillon d’un désir inassouvi et qui ne se peut procurer de la joie que par l’intermédiaire de la douleur et de la privation. […] Chaque individu perd de vue la valeur représentative de ses actes et de ses passions pour ne s’attacher qu’au bonheur ou à la douleur qu’il en retire. […] À savoir qu’ils ne peuvent rien changer à la forme de leur volonté, aux modes de leur activité, à la fatalité de leurs passions, non plus qu’aux circonstances avec lesquelles leur personne doit en venir aux prises, la plupart des hommes seraient atteints de désespoir ou frappés de torpeur.
Dieu met en lui la passion ; la société y met l’action ; la nature y met la rêverie. De la passion combinée avec l’action, c’est-à-dire de la vie dans le présent et de l’histoire dans le passé, naît le drame. De la passion mêlée à la rêverie naît la poésie proprement dite.
Cet avocat, né avec un sens droit, un esprit clair & juste, avec une passion forte pour la vérité, sentit qu’elle étoit continuellement étouffée par un étalage ridicule de paroles inutiles & pompeuses. […] Guéret condamnoit surtout le talent d’émouvoir les passions : il ne vouloit pas qu’on en fit usage au barreau. […] Il s’appuyoit de l’autorité d’Aristote, qui ne veut pas que les avocats remuent les passions ; & de la défense que fit l’aréopage, à ceux d’Athènes, d’employer le pathétique.