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416. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Mathilde de Toscane »

Je me contenterai des paroles par lesquelles il termine son jugement sur l’ensemble de la vie du pontife, et où la plume de l’historien a été constamment digne de son sujet : « Cet homme — dit-il en finissant — ne savait inspirer que des sentiments excessifs, la haine la plus violente ou le plus absolu dévouement. […] Il n’a jamais assez de fortes paroles pour les exprimer. […] Saint ou politique, grand apôtre ou grand ambitieux, il a été tout par l’esprit, et il faut, de toute façon, qu’on le tienne au premier rang des hommes. » V Solennelles et imposantes paroles !

417. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

C’est alors en effet que, de toutes parts, dans ces chambres hautes où ils s’assemblaient, dans ces catacombes où ils se cachaient, dans ces mines qu’ils étaient condamnés à fouiller, des hommes chantaient un hymne à Dieu et se fortifiaient de la maxime de l’Évangile : « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole sortie de la bouche de Dieu. » C’est-à-dire que, rejetant pour eux-mêmes le partage d’un grossier bien-être acheté par le silence et la servitude, ils aspiraient à tous les biens de l’âme, à la profession publique de leur culte, au soulagement de leurs frères, à la flétrissure du vice et de l’oppression, à la réforme, à la conquête morale du monde. […] Quand de telles œuvres sont réservées à l’action de la parole humaine, quand le pur enthousiasme du bien demeure un ressort journalier de réformes sociales, ne craignons pas pour un peuple ni pour une époque le dessèchement des sources de la vie morale : ce n’est point-là ce progrès du calcul matériel et de la force, qui ne prolongerait la durée d’une nation qu’en atrophiant son âme. […] De ces prêches que l’unité de ferveur, dans la liberté de croyance, multiplie parmi les sectes chrétiennes d’Amérique, il jaillira toujours des paroles de feu qui entretiendront l’enthousiasme de la charité dans les âmes.

418. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XVI » pp. 64-69

Nous (la Revue suisse) n’avons pas à le juger politiquement ; mais, à entendre dans cette bouche éloquente ce torrent de magnifiques paroles en sens tout contraire au courant d’hier, nous nous sommes rappelé involontairement ces vers d’Homère (Hiade, XX, c’est Énée qui parle) : « La langue des hommes est flexible, et elle a toutes sortes de discours — de toutes les couleurs, — et le pâturage des paroles s’étend çà et là. » Le noble Pégase a déjà parcouru en bien des sens le pâturage immense, tant sur la rive droite que sur la rive gauche, depuis le jour où d’un coup de son ongle sonore il faisait jaillir au début l’ode sur le duc de Bordeaux : Il est né l’Enfant du miracle.

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