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402. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

. — Bruyant, le Taureau, prend alors la parole : Brun voulait le jugement ; lui, Taureau, n’en veut pas. […] J’omets les injures. — Ici le Blaireau, sire Grinbert, cousin germain de Renart et son défenseur déguisé, prend la parole et sème la zizanie parmi les opinants. […] Certes, ce n’est pas là le fait d’un bon mari, et il n’y a pas assez de lardons pour elle si jamais elle lui pardonne. — Il a réussi dans son moyen oratoire : la dame Hersent, ainsi provoquée, rougit et saisit la parole en soupirant. […] Je suis venue de toi me plaindre ; mais je ne trouve qui me fasse droit ; car tu ne crains ni menace de personne, ni colère, ni paroles. » — La malheureuse Pinte, en parlant ainsi, tomba pâmée sur le carreau, et toutes les autres de même à la fois.

403. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

Le président Jeannin, amateur de la paix et sachant qu’au fond c’était aussi la politique de Henri IV, sut dissimuler dans l’origine et ne pas donner son dernier mot : Il était, a dit Grotius, si puissant en paroles et tellement maître des mouvements de son visage, que, quand il cachait le plus ses sentiments, il semblait toujours qu’il parlât à cœur ouvert (Vultus autem sermonisque adeo potens, ut cum maxime abderet sensus apertissimus videretur). […] Après une de ces exhortations de l’ambassadeur en faveur de la paix, Bentivoglio ajoute : « Sur le visage et dans les paroles du président Jeannin, on croyait voir respirer la majesté et la présence du roi de France lui-même. » Le président Jeannin s’attache à montrer aux États-Généraux qu’une longue trêve équivaut à la paix et vaut même mieux à certains égards, en ce qu’elle ne permet point de s’endormir ; qu’il suffit que cette trêve soit conclue envers eux à d’honorables conditions, c’est-à-dire comme avec des États libres sur lesquels le roi d’Espagne et les archiducs ne prétendent rien ; que si l’on sait bien profiter de cette trêve en restant unis, en payant ses dettes et en réformant le gouvernement, elle pourra se continuer en paix absolue. […] On a vu le roi d’Espagne s’inquiéter de la situation des catholiques dans les Provinces-Unies, et la vouloir remettre sur le pied où elle était primitivement ; mais il le faisait d’un ton d’ancien maître, et sa parole n’était capable que d’aigrir et d’ulcérer les dissentiments religieux. […] Au reste, pour apprécier l’ensemble de la conduite et du caractère du président Jeannin en ces années, on n’a rien de mieux à faire que de s’en rapporter au témoignage décisif du cardinal de Richelieu, un moment son adversaire, qui le vit de près à l’œuvre, qui lisait et relisait ses Négociations manuscrites durant son exil d’Avignon, et à qui il échappe à son sujet des paroles d’une admiration généreuse : On ne saurait assez dire de ses louanges, écrit-il à l’occasion de sa mort ; mais il faut faire comme les cosmographes qui dépeignent dans leurs cartes les régions tout entières par un seul trait de plume.

404. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

Doué des dons naturels de la personne, de la physionomie et de la figure, de la séduction de l’organe et de l’agrément de la parole, il brilla au premier rang comme professeur et comme orateur académique ; à ce dernier titre, il a sa place encore aujourd’hui parmi ceux qui, tout en les louant, ont su peindre les hommes. […] Son œil était spirituel, son regard noble, sa parole douce ; il avait le maintien réservé, l’abord honnête et quelquefois un peu froid. […] Ce fut sans doute lorsqu’il se tut pour écouter son semblable, pour recueillir ses paroles, pour se pénétrer de son esprit. » Et lorsque ces marques de respect et d’attention sont accordées à l’extrême jeunesse d’un homme studieux et déjà savant, la jouissance chez celui-ci est plus grande ; l’amour-propre s’y décore de chaleur et de sympathie. […] De telles paroles prononcées par lui le 27 janvier 1778, au moment où la querelle s’envenimait, était la plus délicate vengeance ; elles devaient être goûtées et applaudies d’un public composé de plus en plus de gens du monde, et qui en avait les mœurs.

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