Ceci n’est pas encore un grand éloge : le Monarque pouvoit se contenter à peu de frais, & le Savant paroître merveilleux avec une érudition fort ordinaire.
Tel est le défaut ordinaire de ces Ecrivains féconds, plus jaloux de multiplier les volumes, que d’acquérir la solide gloire de se rendre utiles aux Lecteurs, en mettant des bornes à leur malheureuse fécondité.
Il est si rare de trouver des esprits aussi pénétrans que sages, pour saisir dans une juste précision ce qui constitue la vraie beauté de chaque genre ; il est si ordinaire de voir des esprits présomptueux donner leurs rêveries pour des découvertes, les égaremens de leur goût pour des regles sûres, les productions de leur plume pour des modeles irréprochables, qu’on doit regarder les Ecrits des vrais Littérateurs comme des préservatifs contre la décadence des Lettres, ou comme ces colonnes milliaires qui, chez les Romains, indiquoient les grandes routes, & éloignoient les voyageurs des chemins détournés.