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1060. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

S’attacher à son œuvre, l’achever, la parfaire, c’est aussi un moyen de s’attacher à la vie. […] Alors nous voyons tout en noir, hommes et choses… Mais employons-nous l’encre de notre écritoire à noircir du papier, aussitôt notre esprit se rassérène ; notre imagination se purge, et, nos œuvres fussent-elles œuvres de misanthrope, notre humeur, charmée par le travail, ferme cette plaie dont vous vous plaignez. […] S’il s’agissait de juger d’œuvres nouvelles, inédites ou tout fraîchement imprimées, il n’avait pas, à mon sens, le jugement très sûr, le coup d’œil bien précis : il tâtonnait un peu, il ne devançait pas le public ; il prédisait souvent à côté. […] Parce que les œuvres de l’un ont une élévation qui manque à l’autre. » Il y aurait trop à citer.

1061. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. »

On peut donc s’imaginer quels furent l’étonnement et la joie d’un esprit studieux et véritablement historique lorsqu’il se vit introduit tout à coup au milieu et au centre de toutes les informations les plus copieuses, les plus précises, les plus lumineuses, au cœur même de l’œuvre de Louvois. […] Quoi qu’il en soit, Louvois parut de bonne heure à Louis XIV un des instruments les plus utiles dont il aurait à se servir pour l’œuvre royale qu’il méditait. Cette œuvre était de reprendre les grands desseins de Henri IV, de Richelieu, d’imprimer à sa politique un caractère autrement auguste que ne l’avait pu faire l’adroit et habile Mazarin, de marquer par des guerres glorieuses et fructueuses son avènement réel et sa prise de possession comme roi. […] Il en profite pour être présent en tout lieu, pour s’instruire de tout sans bruit, sans appareil, et comme d’affaires de sa maison ; il voit de près et touche de ses mains les irrégularités de tout genre, les énormités et les lacunes de l’administration de la guerre, aucun abus ne lui échappe : il conçoit et prépare sans un instant de relâche cette organisation centrale, cette discipline rigoureuse, cette égalité de tous sous un même règlement, ce contrôle des deniers de l’État. cette économie et ce ménagement des subsistances, cette coordination et cet ajustement de toutes les parties du service, qui sont proprement son œuvre. […] Si nous lui cherchions des analogues de nos jours parmi les hommes que nous avons vus à l’œuvre et que l’histoire a déjà mesurés, nous serions obligés de remuer et d’associer bien des noms.

1062. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

De là, grâce à lui, un Catalogue de l’œuvre des trois frères comme il n’y en avait pas eu encore. […] Je ne puis guère, sans sortir de mon domaine qui est déjà bien assez étendu et assez vague comme cela, me mettre à mon tour à décrire en détail les principaux tableaux des frères Le Nain et m’appesantir sur le caractère de leurs œuvres. […] Il n’est guère possible de les distinguer entre eux d’après leurs œuvres ; ce serait tout au plus possible pour le troisième, plus mondain. […] Malgré ce léger défaut d’action et de composition qui ne s’aperçoit qu’en y repensant et à l’analyse, l’effet de lumière est si vrai, si large, si bien rendu, si pleinement harmonieux ; la bonté, l’intelligence et les vertus domestiques peintes sur toutes ces figures sont si parfaites et si parlantes, que l’œuvre attache, réjouit l’œil, tranquillise le cœur et fait rêver l’esprit. […] Champfleury d’ailleurs, dans cette sorte de vie conjecturale des Le Nain, qu’il tire par induction de l’étude et de la comparaison prolongée de leurs œuvres, a de la chaleur, de la verve, et un accent de sympathie qui sort du cœur ; on sent que c’est bien pour ses maîtres d’adoption et presque pour ses saints qu’il prêche : « Qu’ils soient trois ou quatre frères, dit-il, les archivistes le découvriront peut-être un jour16.

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