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641. (1874) Premiers lundis. Tome II « Henri Heine. De la France. »

Souvent, le soir, regardant quelque coin de ciel, des toits lointains, çà et là un rare feuillage, je me suis dit qu’un tableau qui retracerait exactement cette vue si simple serait divin ; puis j’ai compris que cette fidélité entière était impossible à saisir directement ; que mon émotion résultait du tableau en lui-même et de ma disposition sentimentale à le réfléchir ; que, de l’observation directe de l’objet, et aussi de la réflexion modifiée de cet objet au sein du miroir intérieur, l’art devait tirer une troisième image créée qui n’était tout à fait ni la copie de la nature, ni la traduction aux yeux de l’impression insaisissable, mais qui avait d’autant plus de prix et de vérité, qu’elle participait davantage de l’une et de l’autre19.

642. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XV » pp. 175-187

Quatre objets, qui se représentaient sans cesse aux yeux ou à la pensée sous la monarchie ancienne, et surtout dans la littérature, avaient fait contracter ces habitudes de respect : les femmes, les prêtres, les grands, les rois. Aujourd’hui, aucune illusion n’entoure ces objets du culte qui était autrefois général.

643. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Th. Gautier. Émaux et Camées »

Théophile Gautier était le poète de la matière, somptueux ou dégoûtant comme elle, la prenant toute dans le terrible contraste de ses phénomènes, n’ayant pas plus d’horreur que le chimiste qui ne voit, lui, que des compositions ou des décompositions de gaz où nos sens voient des choses qui les font cabrer, indiffèrent enfant de la terre, comme dit Shakespeare, à tout ce qui n’est pas le rendu plastique de l’objet matériel, quel qu’il soit. […] Gautier, cette Muse de la réalité terrestre, entourée, comme la Mélancolie d’Albert Durer, d’objets, affreux ou immondes, a grandi de plus d’un empan et s’est ouverte dans Émaux et Camées.

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