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221. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803 » pp. 2-15

Molé en avait écrit en ce sens, lui répondit à tête reposée, et sa lettre, qui ne visait qu’à excuser leur ami commun et à chercher à sa conduite des raisons atténuantes, est devenue sous cette plume ingénieuse et subtile le portrait le plus merveilleux, le plus achevé, du moral de Chateaubriand à toutes les époques. […] alors, si on laisse la question de talent à part et à ne parler qu’au moral, il se gâta décidément ; il se plissa au front et au cœur d’un repli de plus ; il mit un dernier bouton, sauf à le faire sauter de temps en temps quand cela le gênait. […] Je les attends à l’autre monde ; c’est là seulement que je renouerai mes amitiés2. » Est-ce donc trop s’avancer que de croire qu’après tant de preuves publiques et privées, et après ce dernier témoignage, longtemps resté secret, qui vient de sortir, — cette grande lettre datée de Villeneuve-le-Roi, — le moral et le caractère de Chateaubriand sont connus, et que, quelle que soit la mesure de sévérité ou d’indulgence qu’on y veuille apporter, les points principaux sur lesquels roule le jugement sont suffisamment fixés et établis ?

222. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

L’invention des faits surnaturels a son terme ; ce sont des combinaisons très bornées, et peu susceptibles de cette progression qui appartient à toutes les vérités morales, de quelque genre qu’elles soient : lorsque les poètes s’attachent à revêtir des couleurs de l’imagination les pensées philosophiques et les sentiments passionnés, ils entrent en quelque manière dans cette route où les hommes éclairés avancent sans cesse, à moins que la force ignorante et tyrannique ne leur enlève toute liberté. […] L’aspect du ciel et de la terre, à toutes les heures du jour et de la nuit, réveille dans notre esprit diverses pensées ; et l’homme qui se laisse aller à ce que la nature lui inspire, éprouve une suite d’impressions toujours pures, toujours élevées, toujours analogues aux grandes idées morales et religieuses qui unissent l’homme avec l’avenir. […] Ces longueurs, en effet, lassent quelquefois l’intérêt, mais la lecture des romans anglais attache, par une suite constante d’observations justes et morales, sur les affections sensibles de la vie.

223. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre III : Le présent et l’avenir du spiritualisme »

Tous les spiritualistes sans exception croient à la fois à la nécessité de l’esprit d’examen ; mais il semble que les uns attachent plus d’importance à la doctrine qu’à la liberté, aux conclusions déjà trouvées qu’à la recherche de vérités nouvelles, à la défense qu’à la découverte, à l’intérêt moral et pratique qu’à la pure science et à la libre spéculation, au repos qu’au mouvement, à la tranquillité d’une conviction satisfaite qu’aux ardeurs toujours anxieuses et dangereuses d’une pensée en travail. […] Beaussire (la Liberté dans l’ordre intellectuel et moral), et surtout M.  […] Fouillée, dont l’Académie des sciences morales vient de couronner un mémoire sur la philosophie de Platon, aussi remarquable par la pensée que par la science.

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