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997. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Conclusions » pp. 169-178

Moréas offre ses Stances à la Revue des Deux Mondes qui les repousse comme indignes d’elle et l’Académie française lui refusé le prix Archon-Despérouse que ses admirateurs avaient, à son insu, sollicité pour lui. […] Ils savent que leur royaume n’est pas de ce monde et que la gloire ne fleurit guère que sur les tombeaux. […] Avec ses palais et sa population hétéroclites, ses noubas, ses aimées, ses danses nègres, ses derviches tourneurs et ses cortèges javanais, elle nous rend l’image du monde en raccourci. […] Soyons sûrs que la lueur s’en verra de loin et que les effets s’en feront sentir jusqu’au bout du monde.

998. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre V. Des trois ordres de causes qui peuvent agir sur un auteur » pp. 69-75

On désigne par le nom d‘hérédité l’ensemble de ces manières d’être corporelles et mentales que tout enfant apporte en venant au monde. […] Il est permis de croire que l’exaltation religieuse de Pascal, son renoncement si brusque et si absolu à la vie du monde, voire même à la vie scientifique, furent dus en grande partie au mal obscur et grave qui l’atteignit à la fleur de l’âge et le coucha si jeune au tombeau. […] C’est d’abord qu’on a employé une mauvaise méthode : on a étudié cette influence du monde extérieur sur les grands hommes, qui sont des êtres d’exception, qui ont le plus souvent voyagé, quitté leur pays, qui, par conséquent, appartiennent à plusieurs milieux. […] Température, aspect général du monde extérieur, nature du sol, flore et faune, état ordinaire du ciel, régime des eaux et des saisons : tout cela doit être considéré et tout cela varie parfois d’année en année et dans l’espace de quelques lieues.

999. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Rome et la Judée »

Franz de Champagny a beau nous dire avec raison, dans sa préface, que la question pour le monde et l’histoire n’est ni la question économique, ni la question politique, ni même la question sociale, mais la question morale, la question de l’homme, de sa vie terrestre et de sa vie au-delà de la terre : « L’homme est-il souverain ou subordonné ? […] Le livre de Champagny pourrait se résumer intégralement dans trois colonnes au plus : les prédictions de Jésus-Christ, l’état contemporain du monde, et la chronologie du siège de Jérusalem. […] Dans ce grand sujet de Rome et la Judée, dans ce vis-à-vis énorme, mais si facile à la rhétorique et aux déclamations, du monde de l’ancien Testament aboli, de la Synagogue dispersée par l’épée romaine, et de la chaire de Saint-Pierre érigée debout, dans l’apocalypse d’un monde nouveau, il aurait fallu une touche si mâle et si ferme, il aurait fallu quelque reflet surnaturel de saint Paul et de saint Jean réunis, formant le rayon d’une inspiration plus que pittoresque et plus que littéraire, et, au lieu de cela, nous avons un peintre grêle de salon, — presque un feuilletoniste d’histoire, quelque chose comme un Pontmartin historique ; car Champagny, dans ce dernier livre, a beaucoup de Pontmartin !

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