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1169. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Ce n’était point eux qui y mettaient de la finesse, c’était de la finesse qui s’y rencontrait… On accuse quelquefois les gens d’esprit de vouloir briller ; oh ! […] Les cœurs au fond étant à peu près d’accord dès le début, et les dangers ou les empêchements du dehors faisant défaut, Marivaux met la difficulté et le nœud dans le scrupule même, dans la curiosité, la timidité ou l’ignorance, ou dans l’amour-propre et le point d’honneur piqué des amants. […] 81. » Il mêlait aux éloges, aux beaux noms de La Bruyère et de Théophraste qu’il ne craignait pas d’appliquer à notre auteur, quelques réserves et quelques censures morales, en priant son nouveau confrère de les lui passer et de les mettre sur le compte du ministère saint dont il était chargé. […] Le public en avait assez pour longtemps de ce mets délicat et de cette sucrerie dont on ne pouvait, sans s’affadir, goûter beaucoup à la fois. […] et Marivaux a ajouté à ce qu’on en savait déjà ; il a fait quelques pas de plus dans le gracieux labyrinthe de la vanité féminine ; il nous a mis à la main un fil délié et furtif pour nous y conduire.

1170. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Poujoulat écrit dans toute la confiance et la sécurité des convictions françaises, qui ne soupçonnent pas assez la nature et la force des objections mises en avant par une science critique plus indépendante, plus étendue. […] Il serait facile ici de le mettre aux prises avec M. de Lamartine qui, tout en admirant Bossuet, est d’un avis contraire ; mais on me permettra plutôt de me détourner quelque temps des commentateurs et des peintres pour aller droit au maître. […] Encore une fois, Horace n’a rien à faire de particulier avec Bossuet, et il n’y a pas lieu de le mettre en cause à son sujet. […] Te voilà assiégée de tes ennemis, comme mon maître te l’a prédit quarante ans auparavant : « … Jérusalem, te voilà pressée de tous côtés, ils t’ont mise à l’étroit, ils t’ont environnée de remparts et de forts ! » Ce sont les mots de mon texte ; et y a-t-il une seule parole qui ne semble y avoir été mise pour dépeindre cette circonvallation, non de lignes, mais de murailles ?

1171. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — II. (Fin.) » pp. 427-443

Cependant, comme il pressent une partie des objections qu’on peut lui faire, il voudrait les réfuter et aller au-devant par un autre tableau, celui de l’automne et des Vendanges ; il a hâte de se mettre à ce dernier, aussitôt après avoir terminé l’autre : Ce à quoi je tiens beaucoup, disait-il, c’est à faire paraître mes deux tableaux en même temps, et je vous assure que pour ma réussite c’est nécessaire. […] C’est d’une nature si forte, d’une énergie si étonnante, qu’il me semble qu’on ne peut rien mettre en ligne. […] Il prétend toutefois n’y pas mettre précisément du sien : il veut arriver au beau, et il le veut non en l’inventant, mais en le retrouvant avec effort, en le déchiffrant pour ainsi direu, sous les altérations et les ombres qui le défigurent et le recouvrent dans la réalité : Pour trouver le beau d’une chose, ne faut-il pas la voir, la retourner sous toutes ses faces ? […] Vers la fin, il semble avoir tenté quelque chose d’impossible ; il exigeait trop de lui-même, il voulait mettre à des tableaux de nature une expression tirée du plus profond de l’âme, et qu’il faut rencontrer plutôt que l’aller chercher si loin. […] il semble qu’on n’a plus rien à y mettre, et qu’il est fermé aux sentiments qui donnent tant de jouissances à la jeunesse. » Il résistait à l’égoïsme et à ce goût de jouissances positives qui prend certaines natures, même distinguées, dans la seconde partie de la vie : « Une vie matérielle qui peut convenir à beaucoup n’a jamais pu m’accommoder ; et, à présent que pour nous elle pourrait remplacer celle des illusions, il est impossible qu’elle me satisfasse assez pour me donner du plaisir d’être habitant de la terre. » C’est ainsi qu’il parlait à ses amis Schnetz ou Navez ; mais avec M. 

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