— pendant dix volumes, de cinq cents pages chacun, une histoire faite avec des légendes de vingt lignes, — et je ne me plains pas des légendes, je ne me plains que de leur brièveté, — des légendes qui ne sont pas dorées, celles-là, car, vous le verrez tout à l’heure, elles sont écrites avec une main lourde et une encre opaque. Au lieu d’une histoire qui se tienne, comme une fresque, dans une unité brillante ou profonde, nous aurons une histoire, morcelée en panneaux étroits, avec un semis de petits médaillons, grands comme le fond de la main, et uniformément petits, quoique déjà il y ait, parmi tous ces moines oubliés de l’histoire, parmi toute cette masse immense de violettes de sainteté humble qui trouvent, elles ! […] Si la vue de l’auteur des Moines d’Occident s’élève ou si son style s’avise de briller, c’est qu’un autre que lui regarde par son œil et écrit par sa main !
Il y a là, dans cette publication de chez les frères Garnier, huit à dix volumes qui ne sont que la fleur d’un panier très plein et très profond, dans le fond duquel je ne plongerai pas mes mains indignes, mais je me permettrai de toucher, sans appuyer, au velouté de toute cette fleur. […] Par le Panthéisme, en effet, le Matérialisme a toujours un pied et une main dans la philosophie contemporaine, et ce n’est pas le Spiritualisme, réduit à ses seules forces, qui coupera jamais ce pied et cette main-là.
Écrasé par le sujet auquel il avait osé mettre la main, l’historien n’en avait pas moins écrit son nom à la suite du nom de Bossuet, et les rayons du nom flamboyant se projetaient sur le nom fait pour rester obscur. […] Ce n’est plus là le grand portail officiel que l’imagination idéalise, cette apothéose du plafond que la postérité regarde d’en bas et admire ; ce n’est plus le Bossuet de Versailles dont la main, brillant de l’émeraude donnée dans la mort par Madame Henriette, s’étend haut de la chaire sur le front pensif ou pénitent de Louis XIV ; ni ce prélat majestueux, ce grand artiste en dignité extérieure, qui ordonnait qu’on changeât dans ses jardins de Meaux un escalier en pente adoucie, pour que les flots moirés de sa robe violette traînassent derrière lui avec une décence plus grandiose. […] Enfin, il se faisait lentement ce Bossuet dont un moine de ces derniers temps a pu dire, pour montrer qu’il avait aussi bien en lui la douceur résignée, le sentiment de l’immolation, — toute la mélancolie chrétienne qu’on lui refuse, — que la force qu’on ne lui nie pas : « Il avait la main droite sur le lion de Juda, et la gauche sur l’Agneau immolé avant tous les siècles. » Mot le plus plein et le plus résumant qui ait été dit sur Bossuet !