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1478. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Cette loi de nature, Arnolphe n’en a tenu aucun compte. […] Car il viole une loi de nature. […] Voilà Philinte et Éliante mariés ; ils sont parfaitement heureux, car ils le sont suivant toutes les lois de la raison. […] C’est une raison tirée des lois nécessaires de l’art dramatique ; et en l’exposant nous nous trouverons écrire un des chapitres de cette esthétique du théâtre, que nous avons commencée. […] Mais en art, il y a une loi qui domine toutes les autres, c’est celle de l’harmonie.

1479. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

La vie urbaine avait beau être jusqu’au dix-neuvième siècle ta vie ordinaire des poètes et de leurs lecteurs ; une sorte de convention tacite, fondée d’ailleurs sur une loi profonde, paraissait l’exclure de la poésie. […] Il y a pourtant cette différence que Flaubert ne comprend à peu près rien en droit et tombe malade de dégoût devant l’absurdité des lois, tandis que Fromentin, esprit aisé et précis, habitué au travail méthodique, s’en nourrit avec indifférence, et passe aisément ses examens. […] Et la traduction qu’est la critique d’art, ou du moins sur laquelle repose la critique d’art, subit les lois du genre. […] Le Sic vos non vobis demeure la loi de toute création. […] D’où il tire sa loi d’ironie, apparentée à l’ironie métaphysique de Schlegel, de Tieck, de Solger, loi qui veut que toute réalité vivante présente un point de vue d’où elle réalise l’absurde, d’où le fait de son être réfute ses raisons d’être.

1480. (1900) Molière pp. -283

Molière ne s’est senti tout entier lui-même, il ne s’est senti bien à l’aise, bien au large, que dans les farces poussées aux dernières limites de l’extravagance et de la grossièreté sans loi. […] Je ne veux pas discuter ici la loi sur la propriété littéraire, je sortirais du domaine qui m’est attribué ; je reste convaincu que s’il y avait eu dans l’ancienne France, sur la propriété littéraire, une jurisprudence analogue à celle qui existe aujourd’hui, il y a dix chefs-d’œuvre dans notre langue que nous n’aurions pas. […] Elle est peut-être exagérée, mais, quoi qu’il en soit, quand je me rappelle une certaine loi sur l’aliénation mentale, en vertu de laquelle tout le monde peut être enfermé sur la consultation d’un médecin, je m’étonne que les adversaires de cette loi, au lieu de la discuter à l’aide d’arguments très solides et très passionnés, n’aient pas plutôt reproduit cette admirable scène de M. de Pourceaugnac. […] On a beau faire des lois pour fonder l’autorité paternelle excessive, ou pour protéger la femme et les enfants, toutes les lois du monde ne sauraient empêcher qu’à l’état d’exception se produisent, dans la vie privée, dans cette vie qui est et qui doit être murée, des luttes, des révolutions intestines, des usurpations de pouvoir, que l’audace entreprend, que la ruse accomplit sans combattre, et que la faiblesse tolère. […] ——— Le peuple français est le peuple de l’Europe qui a toujours cherché à mettre le plus de démocratie dans ses lois et qui se soucie encore le moins d’en introduire dans ses mœurs.

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