Amaury se présente ; un sourire de confiance l’accueille ; mais on se sent ému de colère, à le voir, amant honteux, bavard et sophiste, encore tout souillé de caresses achetées à vil prix, « substituer la vie subtile du cœur au trouble épais de l’heure précédente », et achever dans des entretiens mystiques des soirées commencées dans les mauvais lieux. […] C’est ici le lieu de demander si, parce qu’une langue s’est modifiée en traversant une révolution, parce qu’elle est sortie jusqu’à un certain point de ses anciennes voies, parce qu’elle s’est rajeunie, ravivée, au souffle fécondant d’un écrivain de grand génie, si pour cela elle est condamnée à subir toute espèce de métamorphose ; s’il est permis à chacun de la refaire à son image, de l’habiller suivant sa fantaisie, suivant son caprice. […] au souvenir que je garderai de ces lieux étranges, pas un souvenir ami ne viendra s’associer pour me les rendre chers ! […] Nous voudrions pouvoir citer en entier ce speech vraiment remarquable, le citer dans sa langue, avec tout ce luxe de phraséologie orientale, si éloigné de la manière habituellement simple et précise de Jacquemont, mais qui empruntait du climat, du lieu, de la circonstance, un singulier éclat ; nous voudrions reproduire tout l’effet de ce curieux discours ; mais il est fort long ; c’est tout le programme de cette politique libérale et pacifique qu’a suivie la France depuis la révolution de juillet, et qu’une sorte de divination révélait en ce moment à notre jeune compatriote. […] Allard sur les lieux, pour leur ôter tout sujet de querelle, c’est-à-dire les neuf lacs. » Le compatriote d’un si habile financier est sûr d’une réception distinguée auprès du roi de Lahore ; mais il a un autre titre à sa considération ; Runjet-Sing s’est mis en tête que Victor Jacquemont est un envoyé secret de l’Angleterre.
Son père, qui était capable de mieux, doué, à ce qu’il paraît, d’une certaine éloquence, et qui parlait d’or , nous dit son fils, s’était enterré dans la campagne à faire les affaires du seigneur du lieu et de la noblesse. […] Montaigne, en ses Essais, au chapitre xxxive , qui a pour titre : « D’un défaut de nos polices », avait dit : Feu mon père, homme, pour n’être aidé que de l’expérience et du naturel, d’un jugement bien net, m’a dit autrefois qu’il avait désiré mettre en train qu’il veut ès villes certain lieu désigné auquel ceux qui auraient besoin de quelque chose se pussent rendre et faire enregistrer leur affaire à un officier établi pour cet effet : comme « Je cherche à vendre des perles ; Je cherche des perles à vendre ; Tel veut compagnie pour aller à Paris ; Tel s’enquiert d’un serviteur de telle qualité ; Tel, d’un maître ; Tel demande un ouvrier ; Qui ceci, qui cela, chacun selon son besoin ».
C’est, comme nous avons dit, parce qu’en France l’injure avilit celui qui la souffre, et excite aux injures ceux qui l’écoutent ; au lieu qu’en Angleterre, l’injure parlementaire n’excite pas les injures du peuple… Il écrivait cela en 1802 ; il s’en souviendra plus tard, trente-trois ans après, en adressant ses fameuses Observations, jugées intempestives, aux constitutionnels, sous le roi Louis-Philippe. […] Je dirai pourtant à l’un de ceux qui ont répondu en dernier lieu à M.