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1416. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Henri Heine »

Comme ce jeune Jérusalem dont il nous parle quelque part, et sans lequel (j’en demande bien pardon à Goethe !) […] Dans l’article sur l’Histoire de la littérature allemande, par Menzel, qui finit par une si grande position faite à Goethe, et qui me plaît moins, de toute la différence qu’il y a pour moi entre Goethe et Cervantes, le critique, très jeune, du reste, quand il écrivit ce morceau, aie mérite de son article borné par son admiration exagérée de jeune homme pour Goethe, admiration qui s’amortit plus tard dans l’esprit devenu plus mâle de Henri Heine, lequel commença bien par toutes les idolâtries de son temps, mais fut plus fort qu’elles. […] — amoureux, passionnément amoureux de sa jeune femme, et il constatait avec désespoir que ses lèvres, ses pauvres lèvres, frappées comme tout le reste de son corps, n’avaient plus — supplice épargné à Tantale ! 

1417. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Ernest Hello, mort jeune encore et sans renommée, a plus souffert de son obscurité qu’un homme qui aurait dû avoir la fierté du talent et la résignation du chrétien. […] Une âme souffre à travers ses pages, une âme chrétienne, baptisée, pleine de Dieu, une vraie âme, tandis que dans les pages de La Rochefoucauld, de Vauvenargues et même de La Bruyère, il n’y a que des entéléchies d’Aristote, il y a des esprits et peu d’âme, — quoique, d’entre les trois, le plus jeune, qui sentait palpiter ses vingt ans à travers sa philosophie, ait dit que « les grandes pensées viennent du cœur », La Bruyère, le seul chrétien d’entre eux, ne l’était que correctement, comme tous les honnêtes gens de son époque, mais il devait entendre cette religion, dont il admirait l’ordonnance, à peu près comme Le Nôtre entendait ses jardins. […] Il y a toujours, quand il est bien lui, — car, il ne faut pas l’oublier, il est inégal ; il y a des moments où il s’interrompt d’être lui, et où, comme le disait si drôlement Walter Scott, avec sa charmante bonhomie : « le gentilhomme reste sous son nuage », — il y a toujours autour de sa phrase inspirée la petite flamme bleue que Virgile a fait frissonner autour des tempes du jeune Iule.

1418. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française, par M. D. Nisard. Tome iv. » pp. 207-218

C’est à cause de cette rigoureuse recherche d’exactitude que je me permettrai de remarquer qu’en appréciant si bien André Chénier et en rendant à ce jeune et nouveau classique la part entière qui lui est due, il l’a un peu trop appareillé, en tout, et même pour la destinée, avec cet autre charmant poète de nos jours, Alfred de Musset. André Chénier, mort bien plus jeune que ce dernier, n’a pas été seulement un aimable et poétique génie, ç’a été un caractère.

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