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18. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 65-128

Quand elle reconnut que sa ruse avait réussi et que son amant était en sûreté dans une barque à voile triangulaire qui filait comme une mouette le long des écueils, elle jeta son tromblon, son chapeau, sa poudre et ses balles dans une crevasse, et elle se laissa prendre sans résistance. […] Il ne me fut pas difficile d’en convenir, car je portais déjà envie, dans mon cœur, au dévouement de ma prisonnière ; en passant devant sa loge, je jetai sur elle un regard de respect et de compassion. […] Ne lui parlons pas, son regard seul pourrait nous frapper, si ses yeux avaient des balles comme son tromblon ; fais-lui jeter son morceau de pain de loin, à travers la double grille, par la main du piccinino, et, les autres jours, ne te risque jamais à entrer dans sa loge, sans avoir la gueule des fusils des sbires de la porte derrière toi. […] Je m’approchai donc avec plus de confiance de la sombre lucarne, assombrie encore par le noir pilier, et je jetai un regard furtif à travers les barreaux de fer du premier grillage ; je ne vis que deux yeux fixes qui me regardaient du fond du cachot, tout au fond de la nuit régnant derrière la seconde grille. […] s’écria ma belle-sœur, est-ce qu’on l’aurait bien jetée dans cet égout d’une prison, la belle innocente !

19. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

. — Épicharme s’écriait dans son Philoctète : « Il n’y a pas de dithyrambe possible si on a bu de l’eau. » — Le désordre était la règle de ce lyrisme à outrance, il jetait des cris et des flammes. […] C’étaient les Cendres de ce carnaval, le Memento de la tombe jeté sur l’Evohé de l’orgie. […] Le Dithyrambe se lasse de tourner le pressoir sanglant et capiteux de Bacchus ; il rompt sa chaîne festonnée de pampres, jette son lierre au vent, et va chanter et pleurer, souffrir et s’émouvoir chez les hommes, Le fameux cri de détresse que répéteront longtemps les vieux pontifes du passé : Ουδεν προς Διόνυτον ? […] Le drame devient alors une des vocations du génie d’Athènes ; il se jette sur le théâtre comme sur une conquête. […] Le drame avait beau s’élever et se purifier, s’assombrir et s’attendrir, se vouer aux calamités et aux deuils, ils s’obstinaient à y jouer leur rôle, à jeter leurs quolibets bouffons et obscènes sur ses nobles plaintes.

20. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre II. Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps » pp. 93-102

Le sort en est jeté ; elle a déclaré, il y a dix mois, que dans un an elle prendrait congé de ce parterre qui l’a tant aimée, et comme elle a dit, elle fera. […] Nous voulons parler des couronnes et des bouquets qui se jettent à la fin d’un opéra, d’un ballet ou d’une comédie, aux pieds, souvent assez laids et assez plats, de la divinité à la mode. […] Mais arriver à un spectacle avec l’intention formelle de lancer à l’idole, sa petite couronne ; tenir cette couronne honteusement cachée au fond de son chapeau, et puis, quand la reine en question a fait sa dernière pirouette ou déclamé son dernier vers, lui jeter obscurément la servile guirlande, c’est là tout à fait le métier d’un laquais, d’une maman, ou d’un amoureux de bas étage. Avouez ensuite que c’est là véritablement insulter les fleurs du bon Dieu que de les jeter sans respect, et sans pitié, sur les planches huileuses d’un théâtre ; enfin, ajoutez, pour tout dire, que la plupart du temps ces couronnes maladroites tombent sur la tête mal peignée de quelque brave claqueur. […] « Donc, à la fin de la petite comédie, plusieurs couronnes ont été jetées à mademoiselle Mars.

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