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429. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « César Cantu »

Sans la position incroyable de considération intellectuelle dont jouit l’auteur en Italie, et sans l’éminent talent du traducteur qu’il vient de rencontrer en France, il n’y aurait qu’à laisser mourir cette histoire, de sa propre faiblesse, dans l’obscurité.

430. (1834) Des destinées de la poésie pp. 4-75

Ne pouvant susciter un généreux élan dans sa patrie, dont on la repoussait comme on éloigne l’étincelle d’un édifice de chaume, elle se réfugiait dans la pensée de l’Angleterre et de l’Allemagne, qui seules vivaient alors de vie morale, de poésie et de philosophie, et lançait de là dans le monde ces pages sublimes et palpitantes que le pilon de la police écrasait, que la douane de la pensée déchirait à la frontière, que la tyrannie faisait bafouer par ses grands hommes jurés, mais dont les lambeaux échappés à leurs mains flétrissantes venaient nous consoler de notre avilissement intellectuel, et nous apporter à l’oreille et au cœur ce souffle lointain de morale, de poésie, de liberté que nous ne pouvions respirer sous la coupe pneumatique de l’esclavage et de la médiocrité. […] Qui m’aurait dit alors, que quinze ans plus tard, la poésie inonderait l’âme de toute la jeunesse française, qu’une foule de talents d’un ordre divers et nouveau, auraient surgi de cette terre morte et froide ; que la presse multipliée à l’infini ne suffirait pas à répandre les idées ferventes d’une armée de jeunes écrivains ; que les drames se heurteraient à la porte de tous les théâtres ; que l’âme lyrique et religieuse d’une génération de bardes chrétiens inventerait une nouvelle langue pour révéler des enthousiasmes inconnus ; que la liberté, la foi, la philosophie, la politique, les doctrines les plus antiques comme les plus neuves, lutteraient, à la face du soleil, de génie, de gloire, de talents et d’ardeur, et qu’une vaste et sublime mêlée des intelligences, couvrirait la France et le monde du plus beau comme du plus hardi mouvement intellectuel qu’aucun de nos siècles eût encore vu ? […]   La pensée politique et sociale qui travaille le monde intellectuel et qui m’a toujours fortement travaillé moi-même, m’arrache pour deux ou trois ans tout au plus aux pensées poétiques et philosophiques que j’estime à bien plus haut prix que la politique. […] La Providence me force à tromper toutes ces espérances ; mais que ceux qui m’ont ainsi encouragé dans toutes les parties de la France et de l’Europe sachent combien mon cœur a été sensible à cette sympathie qui a été ma plus douce récompense, qui a noué entre nous les liens invisibles d’une amitié intellectuelle.

431. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

La situation intellectuelle des Germains à l’époque carlovingienne, l’état psychologique et littéraire d’un Saxo Grammaticus, d’un Hrabanus Maurus, sont choses très claires pour moi. […] Je n’y tiens presque pas, et, sauf le petit nombre de personnes avec lesquelles je me reconnais une fraternité intellectuelle, je dis à chacun ce que je suppose devoir lui faire plaisir. […] Telle était aussi la mesure intellectuelle de M.  […] Virgile lui semblait faire partie de la culture intellectuelle d’un prêtre au moins autant que la Bible.

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