Ils donnent l’idée de la vie la plus élégante, la plus somptueuse, la plus digne en somme d’être vécue. […] Mais, encore que l’idée de la vanité universelle soit un grand soulagement, nous préférons quand même aux romans de la vie élégante les romans de la vie plate, misérable et grossière — parce qu’ils nous emplissent d’une infinie pitié. […] Il est tenté de croire, du moins la première fois, à un pétillement naturel d’idées, à un don surprenant, extraordinaire. […] Il était du petit nombre de ces oisifs parisiens qui retiennent des spectacles multiples auxquels les convie la mode, de ce long et ininterrompu défilé de tableaux, de statues, de morceaux de musique, de pièces de théâtre, de cérémonies et de fêtes, des couleurs, des sons, voire des idées, qu’ils cataloguent, au fur et à mesure, dans leur mémoire et dont l’ensemble constitue pour eux une mine féconde, inépuisable d’impressions et de souvenirs, lesquels, habilement mis en œuvre et adaptés aux exigences du moment, leur fournissent toujours à propos le thème inutilement cherché par tant d’autres… III Il y a apparence, après tout cela, que vous ne rencontrerez ici ni les grandes passions, ni les héroïsmes, ni les crimes, ni le romanesque tour à tour délicieux et tragique des romans de M. […] Cette idée que des hommes peuvent juger des hommes, non pas seulement au point de vue utilitaire, mais au nom de la vérité, de la conscience universelle, de l’absolu, me paraît de plus en plus baroque et monstrueuse.
Resté le dernier survivant de la génération d’écrivains à laquelle il appartenait, il lui faisait honneur à nos yeux ; il la personnifiait par les meilleurs côtés ; c’est en la jugeant par lui qu’on s’en pouvait former l’idée la plus favorable. […] La première condition pour bien apprécier les anciens critiques et leurs productions de circonstance, c’est donc de se remettre en situation et de se replacer en idée dans l’esprit d’un temps. […] Dussault avait une instruction bien moins étendue que celle de Geoffroy ; il savait bien le latin, pas le grec ou très peu ; il n’avait pas un très grand nombre d’idées, mais il les exprimait avec soin, il les redoublait avec complaisance. […] Hoffman avait une bien autre étendue de connaissances et d’idées que Dussault ; il savait toutes choses, assez bien l’Antiquité, très bien la géographie, de la médecine, sans compter qu’Hoffman était un auteur dans le vrai sens du mot ; il a fait preuve de cette faculté à la scène dans d’agréables inventions, dans le joli Roman d’une heure, dans l’excellente bouffonnerie des Rendez-vous bourgeois. […] Il a bien des qualités du vrai critique, conscience, indépendance, des idées, un avis à lui.
Mme de Maintenon, en lisant cette version de son propre récit, avait raison de dire à Mme des Ursins : Je voudrais que la relation que je vous ai faite de notre joie sur la bataille d’Almanza fût aussi vive que l’idée que vous vous êtes faites de ce qui se passa dans mon cabinet ; vous l’avez mieux compris de Madrid que je ne l’ai vu, et vous en faites une peinture que je ne pourrai m’empêcher de lire aux personnes qui y ont pris part. […] À cette seule idée, Mme des Ursins se révolte ; son courage se soulève, tout son sang bouillonne. […] Ne la chicanons pas sur ce dernier mot : il y avait confusion alors de l’idée de roi à l’idée de France. — Les plaintes hardies, les conseils, elle ne les ménage pas ; elle espère toujours qu’il en arrivera quelque chose par Mme de Maintenon aux oreilles de ceux qui gouvernent à Versailles : Est-il bien possible, madame, que tous les hommes que vous connaissez vous paraissent à bout, et qu’il n’y en ait point qui imaginent de nouvelles ressources ? […] J’avais eu l’idée, en abordant Mme des Ursins, de marquer quelques-uns des inconvénients des femmes politiques, dont elle est un type pour ce qu’elles peuvent avoir de distingué, et aussi d’incomplet, d’agité, de fastueux et de vain.