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318. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

Il est chrétien, mais sans théologie, d’une foi simple et naïve, distinguant les hommes des choses, et, tout en croyant au pape, osant combattre ses agents, quand ils contrarient les projets des croisés. […] A la foi qui entraînait les seigneurs en Orient, se mêlait un vague espoir de changer l’écu de chevalier contre les armes impériales. […] L’interprétation de Guillaume, le songe lui-même, c’était le bon sens français qui commençait à n’avoir plus foi aux croisades. […] Joinville a en commun avec Villehardouin le caractère du chevalier chrétien, le courage, la droiture, les vertus de la chevalerie sans ses illusions, une foi simple, libre devant le clergé, sans raffinement théologique. […] Par exemple, en Égypte, il s’est enquis de la nature et des propriétés du Nil et quoique sa foi naïve fasse descendre ce fleuve du paradis terrestre, il en donne une description qui n’a pas cessé d’être exacte.

319. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

De but, il n’y en a pas ; de pensée, il n’y en a pas ; de foi, de croyance, de mission, d’amour, il n’y en a pas. […] M. de Vigny prononça un discours sage, modéré, convenable, faisant dignement sa profession de foi littéraire et donnant à l’école nouvelle les éloges qu’elle méritait. […] Nous comptions sur le courage du jeune poëte ; nous pensions qu’il proclamerait hautement sa foi, et que, comme Sixte-Quint, il allait jeter sa béquille. […] Ils muselèrent la presse par des lois oppressives, ils arrêtèrent la représentation des pièces de théâtre, ils jetèrent bas de leur chaire des professeurs savants, sages et aimés. — Ceux-là, qui furent de petits journalistes parvenus, qui sortirent de je ne sais quel salon guindé où l’on avait applaudi leurs vaudevilles et leurs égrillardes chansonnettes, ceux-là qui, grimpant d’épaules en épaules et de méprises en méprises, en étaient arrivés à être tout-puissants sur les choses dramatiques, osèrent porter la main sur Balzac ; ils prirent le géant au collet, mirent son drame dans leur souricière, et, sans reconnaissance des gloires nationales, sans foi artistique, sans pudeur littéraire, ils ruinèrent et mirent à néant l’administrateur courageux qui avait le plus aidé à l’éclosion de toute une vaillante génération de poëtes. — D’autres ont fait pis encore. […] le plus humble d’entre vous et un des derniers venus, je le sais ; mais aussi un fervent qui saura pousser sa foi jusqu’au martyre.

320. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

Il revint de là en soldat de la foi et en missionnaire, décidé à propager et à enfoncer la vérité, coûte que coûte, parmi les infidèles, parmi les fils de Voltaire. […] Au reste gardons-nous bien des professions de foi ; restons dans notre rôle d’observateur qui veut être exact : je vais seulement faire deux ou trois suppositions qui n’en sont pas, mais qui sont des cas en effet existants. — Quoi ! […] — Cet autre homme, lui, est chrétien ; il admet la divinité, une émanation plus ou moins directe de la divinité, une inspiration d’en haut dans la vie, dans les actes et les paroles du Christ : mais il se permet de rechercher quels ont été au vrai ces actes et ces paroles ; il étudie les témoignages écrits, les textes ; il les compare, il les critique, et il arrive par là à une foi chrétienne, mais non catholique comme la vôtre : homme pur d’ailleurs, de mœurs sévères, de paroles exemplaires : et cet homme-là, parce qu’il ne peut en conscience arriver à penser comme vous sur un certain arrangement, une certaine ordonnance, magnifique d’ailleurs et grandiose, qui s’est dessinée surtout depuis le ve siècle, vous l’insulterez, vous l’appellerez à première vue blafard en redingote marron !

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