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304. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

Le fils dit « Monsieur » à son père ; la fille, respectueusement, vient baiser la main de sa mère à sa toilette. […] On compterait aisément les pères qui, comme le maréchal de Belle-Isle, surveillent de leurs yeux et conduisent eux-mêmes avec méthode, sévérité et tendresse toute l’éducation de leurs fils  Quant aux filles, on les met au couvent ; délivrés de ce soin, les parents en sont plus libres. […] On sermonne la vieille Mme du Deffand, qui est trop vive et qu’on nomme « la petite fille » ; la jeune duchesse, tendre et sensée, est « sa grand’maman ». […] Il y avait tel château, celui de Saint-Aubin, où la dame du logis, pour avoir une troupe suffisante, enrôlait ses quatre femmes de chambre, faisait jouer Zaïre à sa fille âgée de dix ans, et, pendant plus de vingt mois, ne faisait pas relâche. […] Non seulement dans leurs petits soupers et avec des filles, mais dans le beau monde et avec des dames, ils font des folies de guinguette.

305. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

La peinture est réellement fille aînée de la papauté. […] Puis-je l’accuser d’avoir contemplé avec trop de complaisance la fille innocente du brigand des Abruzzes, moi qui ai suivi, sur les vagues de la même mer, la fille du pêcheur de Procida ? […] Elle a noué autour de ses cheveux, à demi détachés, une couronne de fleurs sauvages d’un admirable éclat ; on y reconnaît les bleuets, les œillets rouges, les marguerites blanches, les pavots mêlés à des épis de folle avoine, toutes fleurs des hauts pâturages du Jura transportées par réminiscence sur le front de la fille des Abruzzes. […] Les figures de jeunes matelots, de pasteurs, de femmes ou de filles qui se groupent autour de lui, à une distance respectueuse, s’enivrent naïvement et sincèrement des aventures de brigandage, d’héroïsme, d’amour, d’enlèvement, de coups de feu sur la montagne, de tempête sur la mer, d’arrestations par les sbires dans la caverne, de supplice sur l’échafaud, de prière à la madone avant de mourir, qu’elles recueillent en retenant leur respiration. […] Une enfant de huit à dix ans, sa fille, rêve aux sons de la guitare, la tête penchée sur les genoux de sa mère.

306. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

La nature des ouvrages rappelait les occupations sérieuses du père, du fils, et surtout de la fille aînée, mademoiselle Eugénie de Guérin, qui remplaçait la mère par nécessité, par vertu et par goût, auprès de son frère Maurice et de sa plus jeune sœur. […] Les filles n’avaient point de dot ; le fils, aucun moyen d’éducation ni d’avancement. […] Les filles pouvaient attendre un hasard heureux de mariage sans dot, avec quelque gentilhomme veuf ou suranné des environs, ou se vouer généreusement au célibat pour laisser à leur frère leur petite fortune après la mort de leurs parents. […] Ce n’est pas sans quelque plaisir que je reverrai cet endroit, ma cousine, sa fille, et le bon chevalier qui m’aimait tant ! […] La pauvre fille s’en réjouit comme le brin d’herbe, sans savoir pourquoi, si ce n’est que la lumière est pure, et le vent tiède.

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