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516. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIX. M. Eugène Pelletan »

En France, depuis Condorcet, cette foi au progrès est connue, quoiqu’on ne la professe tout haut que sous les réserves du bon sens d’un peuple qui n’aime pas qu’on se moque de lui, et en Allemagne, où l’on n’a rien à craindre à cet égard, cette foi a été redoublée par des systèmes philosophiques qui sont du moins de formidables erreurs, les efforts puissants de grands esprits faux. […] Et quand on est sorti de la Genèse, le roman continue ou du moins une histoire que rien n’affermit ni ne prouve ; qui, lorsqu’elle n’est pas entièrement fausse, quand les faits et les textes ne la démentent pas, n’a pour elle que des inductions et des analogies, assez peut-être pour, donner le doute, pas assez pour donner la foi !

517. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Et si cela est d’une manière absolue, si les circonstances ont sur le sort des livres, une influence plus grande que le talent qu’ils attestent, on peut assurer qu’à l’heure présente, M. de Rémusat est placé dans la situation la plus favorable au rayonnement de tout ce qu’il publie, que ce qu’il publie soit, d’ailleurs, vrai ou faux, médiocre ou supérieur. […] Cet élégant nourrisson de madame de Staël qui n’a point épuisé sa nourrice, trop jeune du temps du Globe pour s’asseoir sur le canapé doctrinaire, mais qui s’est tenu sur le tabouret d’à côté, est un de ces esprits non sans mérite, à coup sûr, mais qui manquent de l’espèce d’énergie, nécessaire pour donner un démenti à leur vie et renverser dans leur intelligence des convictions fausses, même quand elles y manquent de profondeur.

518. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Roger de Beauvoir. Colombes et Couleuvres. »

Avant d’être un homme d’esprit, avant d’être un conteur intéressant, mouvementé, joyeux ou pathétique, avant d’être un auteur de comédie ou de drame, et même avant d’être Alfieri, avant d’être un Dandy en vers, qui met son gant comme lord Byron ou Moore, il était poète sincèrement, primesautièrement poète, en dehors de toute fausse étude et de toute École corruptrice ! […] Nous n’avons pas, il est vrai, parmi nous le génie et la grande figure jupitéréenne de Ronsard, sa dictature indiscutée et funeste, funeste même pour lui, car le faux système a tué sa gloire en l’écrasant dans son œuf d’aigle ; mais, si l’on cherchait bien, on trouverait Desportes, et, en disant cela, nous ne disons de mal de personne… M. 

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