/ 2155
365. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre II. Le dix-neuvième siècle »

Le dix-neuvième siècle a pour famille lui-même et lui seul. […] Ceux-là mêmes d’entre eux, il y en a, qui sont nés aristocrates, qui sont arrivés au monde dépaysés en quelque sorte dans des familles du passé, qui ont fatalement reçu une de ces éducations premières dont l’effort stupide est de contredire le progrès, et qui ont commencé la parole qu’ils avaient à dire au siècle par on ne sait quel bégaiement royaliste, ceux-là, dès lors, dès leur enfance, ils ne me démentiront pas, sentaient le monstre sublime en eux. […] Oui, tous tant que nous sommes, grands et petits, puissants et méconnus, illustres et obscurs, dans toutes nos œuvres, bonnes ou mauvaises, quelles qu’elles soient, poëmes, drames, romans, histoire, philosophie, à la tribune des assemblées comme devant les foules du théâtre, comme dans le recueillement des solitudes, oui, partout, oui, toujours, oui, pour combattre les violences et les impostures, oui, pour réhabiliter les lapidés et les accablés, oui, pour conclure logiquement et marcher droit, oui, pour consoler, pour secourir, pour relever, pour encourager, pour enseigner, oui, pour panser en attendant qu’on guérisse, oui, pour transformer la charité en fraternité, l’aumône en assistance, la fainéantise en travail, l’oisiveté en utilité, la centralisation en famille, l’iniquité en justice, le bourgeois en citoyen, la populace en peuple, la canaille en nation, les nations en humanité, la guerre en amour, le préjugé en examen, les frontières en soudures, les limites en ouvertures, les ornières en rails, les sacristies en temples, l’instinct du mal en volonté du bien, la vie en droit, les rois en hommes, oui, pour ôter des religions l’enfer et des sociétés le bagne, oui, pour être frères du misérable, du serf, du fellah, du prolétaire, du déshérité, de l’exploité, du trahi, du vaincu, du vendu, de l’enchaîné, du sacrifié, de la prostituée, du forçat, de l’ignorant, du sauvage, de l’esclave, du nègre, du condamné et du damné, oui, nous sommes tes fils, Révolution !

366. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Sabran et le chevalier de Boufflers »

(En a-t-elle écrit, cependant, et la haute pruderie de sa famille n’oserait-elle les publier ?) […] Évidemment, un homme qui aurait eu une notion plus mâle de la famille n’aurait pas songé à publier ces lettres, qui ne sont pas adressées à son père, et il se serait souvenu davantage qu’il était Sabran, et non Boufflers… Mais ce ne sont pas là nos affaires… Le livre a paru, et c’est une chose charmante ! […] Elle n’avait rien de cette fameuse et fière Bacchante de sa famille, qui disait au régent lui-même, son amant : que Dieu, ayant dépensé toute son argile à créer l’homme, prit de la boue et du crachat pour faire les princes et les laquais !

367. (1864) Études sur Shakespeare

La famille de Shakespeare habitait Stratford sur Avon, dans le comté de Warwick. […] Quoi qu’il en soit, la famille Shakespeare appartenait à cette bourgeoisie qui a eu de bonne heure tant d’importance en Angleterre. […] À Noël, devant la porte des châteaux, le héraut, portant les armes de la famille, criait trois fois : « Largesse ! […] Le don d’un écusson accordé, ou plutôt confirmé à son père en 1599, prouve en effet l’intention d’honorer sa famille. […] Le besoin de la vie de famille s’est-il fait sentir à lui ?

/ 2155