On y trouve un écrivain dont les grands talens doivent faire oublier ses Lettres du chevalier d’Her… ses comédies peu théâtrales, son Apologie des tourbillons de Descartes & les Essais informes qu’il a faits dans les genres de Lucien & de Théocrite ; plus heureux dans ceux de Quinault & de Bacon, & surtout dans la géométrie ; faisant aimer les sciences les plus abstraites ; réunissant la subtilité du raisonnement à un stile qui lui est particulier & qui a fait beaucoup de mauvais imitateurs ; ayant plus d’esprit que de génie, & plus de délicatesse que d’invention ; placé sous deux règnes pour mériter l’estime de deux siècles, & par la variété de ses connoissances, & par la singularité de son ame toujours paisible, modérée, égale, inaccessible aux mouvemens inquiets ou violens, qui rendent les autres hommes malheureux ; fait, en un mot, pour les agrémens & les délices de la société, mais non pour être l’exemple des belles ames, des cœurs sensibles & reconnoissans. […] Il étoit le premier à donner l’exemple de la soumission & de la déférence : il eut toujours un confesseur à titre.
Il a l’air d’approuver par ce mot ce voleur qui suit l’exemple des autres : proposition insoutenable en morale. […] C’est quelque propos populaire et trivial dont on se passerait bien ; mais il n’appartient qu’à La Fontaine de rendre cette sorte de naturel supportable aux honnêtes gens ; nous en verrons plus bas un autre exemple dans la fable du singe et du léopard.
Rien ne prouve mieux que l’exemple de Baudouin combien les mœurs sont essentielles au bon goût. […] Ce n’est pas moi, qui cependant n’ignore pas ce qu’on peut m’objecter, le peu d’influence que les productions des beaux-arts ont sur les mœurs générales, leur indépendance même de la volonté et de l’exemple d’un souverain, des ressorts momentanés, tels que l’ambition, le péril, l’esprit patriotique.