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467. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

Jean-Jacques était spiritualiste, et par moments une espèce de calviniste socinien : il niait les arts, les sciences, l’industrie, la perfectibilité, et par toutes ces faces heurtait son siècle plutôt qu’il ne le réfléchissait. […] Enfin la plus violente admiration qu’il fit naître lui vint de Naigeon, Naigeon adorateur fétichiste de son philosophe, comme Brossette l’était de son poëte, espèce de disciple badaud, de bedeau fanatique de l’athéisme. […] L’Encyclopédie ne fut donc pas un monument pacifique, une tour silencieuse de cloître avec des savants et des penseurs de toute espèce distribués à chaque étage. […] Mais Socrate, à ma place, la leur aurait arrachée. » Il dit en un endroit au sujet de Grimm : « La sévérité des principes de notre ami se perd ; il distingue deux morales, une à l’usage des souverains. » Toutes ces idées excellentes sur la vertu, la morale et la nature, lui revinrent sans doute plus fortes que jamais dans le recueillement et l’espèce de solitude qu’il tâcha de se procurer durant les années souffrantes de sa vieillesse.

468. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

Mais, dans le dernier cas, l’extrême infériorité du ton tient surtout à une autre espèce d’entraves. […] J’ajouterai, comme raison à l’appui, que cette espèce de chanson est traduite de l’Arioste10 et elle l’a été depuis encore par d’autres poëtes du xvie  siècle, par Olivier de Magny et Gilles Durant. […] On mit en oubli bien d’autres productions de la veille plus dignes de survivre, et dans un recueil des Marguerites poétiques, espèce d’Anthologie finale qui résume la fleur du xvie  siècle20, je ne vois point qu’à l’article Roses on ait daigné se souvenir de cette pièce si gracieuse de Bonaventure des Periers. […] Si cette espèce de blason du corps féminin était de François Ier, on devrait lui reconnaître une vigueur et une haleine dont il n’a fait preuve nulle part ailleurs ; mais tout y décèle une verve exercée qui se sera mise au service de ses plaisirs. — Cette pièce, au reste, n’est pas inédite ; elle a été insérée dans le Recueil des Blasons par Méon (Blason du corps) ; mais, sauf une ou deux corrections qui sont heureuses, le texte de Méon est peu correct, et même à la fin il y a de l’inintelligible.

469. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 457-512

Les lumieres du discernement ont été éclipsées par les transports de l’enthousiasme, & on aura peine à croire jusqu’à quel point cette espece de fanatisme a poussé son aveuglement. […] Nous ne nous proposons pas d'analyser les différens travaux de cette espece d'Hercule littéraire. […] Les Jeunes-gens sur-tout, que le moindre joug importune ; les Esprits légers, à qui la nouveauté est toujours assurée de plaire, que les plus minces saillies persuadent dès qu’elles les amusent, n’ont pas eu de peine à passer du goût à l'enthousiasme, & de l'enthousiasme à une espece de fatanisme. […]   Entraîné par l'amour de la gloire à tous les genres, &, par une vive sensibilité, à toutes les passions, ces deux mobiles sont devenus le ressort principal de ses talens, & la regle du différent usage qu'il en a fait, Modeste, s'il eût été universellement encensé ; doux, s'il n'eût point été contredit ; religieux, & zélateur du Culte dans lequel il est né, pour peu que ce chemin eût pu le conduire à la fortune ou à la célébrite : on l'eût vu le modèle & le défenseur des vrais principes, en tout genre, si l'intérêt de sa vanité eût pu s'accorder avec aucune espece de dépendance.

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