Je veux bien qu’il y ait trente-six situations dramatiques ou romanesques, mais une théorie plus générale n’en peut, en somme, reconnaître que quatre. […] Victor Hugo, voyant un câble qu’on entoure de chiffons à l’endroit où il porte sur une arête vive, voit en même temps les genoux des tragédiennes qui sont matelassés contre les chutes dramatiques du cinquième acte25 ; et ces deux choses si loin, un cordage amarré sur un rocher et les genoux d’une actrice se trouvent, le temps de notre lecture, évoquées dans un parallèle qui nous séduit parce que les genoux et la corde, les uns en dessus, l’autre en dessous, au pli, sont également « fourrés26 », parce que le coude que fait un câble ainsi jeté ressemble assez à une jambe pliée, parce que la situation de Giliatt est parfaitement tragique et enfin parce que, tout en percevant la logique de ces rapprochements, nous en percevons, non moins bien, la délicieuse absurdité. […] En général, les soirées dramatiques, qui offrent plus de variété et une note plus gaie que la conférence ordinaire, sont surtout goûtées du public.
De cette œuvre forcément sacrifiée nous n’avons que des fragments lyriques et dramatiques. […] Nous ne contestons pas les qualités qui recommandent Cinq-Mars : nous trouvons toujours dans ce roman, l’un des meilleurs en ce genre trop décrédité, un certain intérêt dramatique, de la grâce rêveuse, une élégance soutenue. […] Aussi, malgré bien des défauts, estimons-nous singulièrement la Maréchale d’Ancre que Vigny fit représenter à l’Odéon en 1831 et qui ajoute à l’intérêt dramatique l’éclat d’une langue énergique et sonore.
Le reste de son œuvre dramatique, une Françoise de Rimini, un Don Juan d’Autriche, eut moins de succès. […] Les grandes figures, les grands noms, les scènes touchantes, le mouvement dramatique, la lutte et la persécution, l’héroïsme et le génie,’ le retour inopiné du primitif et de l’antique au milieu de l’âge le plus élégant et le plus décidément moderne, je ne sais quel écho solennel du désert parmi les bruits du grand règne et de la grande cité, que faut-il de plus pour attirer vers Port-Royal des esprits frivoles, à travers l’austérité des doctrines et la tristesse des mœurs ? […] On ne peut nier qu’une grande partie de ce que cette histoire a de saisissant et de dramatique ne se rattache à cette famille et à ses attenances.