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788. (1888) Études sur le XIXe siècle

» Un des symptômes les plus curieux de cet état d’effroi continuel devant un échec, une humiliation, un mal possibles, c’est sa crainte naïve et continuelle de la douleur physique. […] Tout le monde sait comme il faut entendre le mot curieux appliqué à un écrivain contemporain. […] De cette curiosité nous avons fait une sorte de critère, et, dans toute une partie du public intelligent, on ne trouve pas de plus bel éloge à faire d’un tableau, d’un livre ou d’un poème, que de le proclamer curieux. […] Capuana s’est avancé à travers plusieurs littératures et marche à travers la vie en notant au jour le jour ce qui lui semble curieux dans ce sens-là. […] Et, pour se rendre compte de la patience et de la sagacité du voyageur italien, il faut lire dans Constantinople le chapitre plein d’observations curieuses qu’il consacre aux chiens errants.

789. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Cependant, même à cette époque de travail solitaire et de logique presque absolue, même avant aucune initiation doctrinaire, cette fine nature était toute seule assez avertie, assez curieuse d’impartialité et assez difficile sur les conclusions, pour s’efforcer de concilier ses idées avec la modération véritable, et pour se garder de ce qu’avaient naturellement d’âpre et d’un peu grossier la politique et la philosophie révolutionnaires. […] Ce qui est surtout curieux à noter, c’est combien déjà il se juge, il se gourmande, il se châtie ; tout ce qu’on serait tenté de lui opposer, il est le premier à se le dire, et bien plus durement et bien plus finement aussi. […] Il est curieux de suivre tout ce dont est capable un grand esprit piqué au jeu, et de voir, en désespoir de cause, la philosophie se faisant drame, la critique, à ce degré de puissance, devenue créatrice. […] Voir, pour les curieux, et comparer avec le mot de Lessing l’épigramme XXXIIIme de Callimaque, et aussi ce que dit Pascal de la chasse et du lièvre : « On n’en voudrait pas s’il étoit offert. » 202.

790. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

Jusque-là il ferme sa porte, et laisse à sa porte les gens trop curieux qui s’obstinent à y frapper. […] Ce qui est plus curieux encore, c’est qu’ils sont tous désintéressés, et que le jeune homme et la jeune fille font fi de l’argent avec la même sincérité qu’à l’Opéra-Comique. […] Votre extrême sensibilité et votre ironie toujours prête ont besoin de s’exercer ; vous n’avez pas assez de calme pour pénétrer jusqu’au fond d’un caractère ; vous aimez mieux vous attendrir sur lui ou le railler ; vous le prenez à partie, vous vous faites son adversaire ou son ami, vous le rendez odieux ou touchant ; vous ne le peignez pas ; vous êtes trop passionné et vous n’êtes pas assez curieux. […] Mais il les explique par leur imbécillité, ou il en fait des monstres curieux comme Grandet et Gobseck.

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