On n’écrit pas. » III Sans doute, entre la critique de la postérité, soit des esprits assez distants pour rentoiler leurs souvenirs de lecture sur une trame historique adventice, et la critique non même du lendemain mais du matin ou de la veille, dont l’exactitude chaleureuse vaut d’abord en tant que d’intéressante information : citations heureuses presque encore inédites, découpées des « bonnes feuilles », anecdotes sur l’auteur, première impression non refroidie, adresse du libraire… sans doute entre ces deux critiques n’y a-t-il point une place nécessaire pour une tierce et intermédiaire, la nôtre, très contemporaine encore, et point toute fraîche cependant, advenant après, ai-je entendu dire, cent soixante-treize articles imprimés sur les Trophées de José-Maria de Heredia. […] Que tous les esprits critiques s’étaient mépris lorsqu’ils caractérisaient par l’impassibilité les « bêcheurs » dont les noms et le cachet figurent aux couvertures de Lemerre ?
Proust fait parler le poète moderne : « Ce ne sont pas des fantaisies, ce sont des systèmes. » Suit la critique de cette lamentable manie. Il n’y a qu’un malheur à cette critique : c’est qu’elle s’emporte contre le plus avéré des moulins il vent. […] Dès lors le sourire surgit au mot blâmé, à l’enfantillage critique. […] Mais tout de même ils les comprennent, les aiment, les estiment. — Nous chérissons entre les poètes mûris un Heredia, épris de toutes histoires et de toutes écritures, entre les critiques un Céard, savant compréhensif, entre les romanciers un Hennique, artiste de souplesse, ennobli d’érudition.
La critique est souvent plus sérieuse que son objet. […] Dans l’état actuel de la science, il n’y a pas de travail plus urgent qu’un catalogue critique des manuscrits des diverses bibliothèques. […] Et, pourtant, il y a là des trésors pour la critique et l’histoire de l’esprit humain. […] Nul plus que moi n’admire le XVIIe siècle à sa place dans l’histoire de l’esprit humain ; mais je me révolte dès qu’on veut faire de cette pensée lourde et sans critique le modèle de la beauté absolue.