C’est alors qu’il ouït parler du sultan Mahmoud, qui, dans sa cour de Ghaznin, s’entourait d’une pléiade de poètes, mettait au concours les histoires des anciens rois, et désirait un homme capable de les orner et de les embellir sans les altérer. […] Le Tasse, au milieu des délices de Ferrare, en sut quelque chose : Ferdousi, à la cour de Ghaznin, va également l’éprouver. […] Les poètes de cour, les rivaux et ennemis littéraires de Ferdousi prétendirent que le succès de son ouvrage tenait à l’intérêt des sujets bien plutôt qu’au talent de l’auteur. […] Cela fait, il résolut de quitter sans retard la cour du sultan, et il partit secrètement, un bâton à la main, en habit de derviche. […] Après ce coup d’éclat, Ferdousi erra durant des années, cherchant une cour où ne pût l’atteindre la colère du sultan.
Mme des Ursins le lui reproche ; elle a des peines infinies à obtenir d’elle de donner accès une fois ou deux aux personnages éminents qui passent à la cour de France et qu’elle lui recommande. […] Mme des Ursins, entière et franche dans son rôle, accueille tout ce qui se présente sur ce théâtre du grand monde et de la Cour, et y fait son discernement : pour pénétrer jusqu’à Mme de Maintenon, il faut être déjà du sanctuaire. […] La layette et le lit du futur prince des Asturies avaient été recommandés d’abord à un habile homme de la Cour, Langlée, l’arbitre des modes ; mais l’économie oblige de rabattre des premières commandes. […] Je trouve cependant que l’esprit de la Cour a bien changé depuis que je suis sortie de France, car le roi ne me paraissait point de ce sentiment lorsque j’avais l’honneur de l’entretenir ; ne serait-ce pas cela la cause de tous nos malheurs ? […] Ses lettres sont remplies de pages vives, qui nous rendent non seulement les mœurs de la cour d’Espagne, mais celles de la société française vers cette fin de Louis XIV.
Quand la société-mère se dispersa, les femmes ridicules qui étaient contenues par le grand nombre les autres, et surtout par la marquise de Rambouillet et sa fille, voulurent avoir à leur tour leur petit empire et leur petite cour. […] Voiture, l’homme le plus à la mode du temps, le bel esprit le plus accrédité de la cour à l’Académie, le plus répandu chez les femmes de qualité, et le plus recherché des femmes de bel esprit, Voiture, en se rendant une fois, une seule fois au cercle d’une femme qui l’en avait prié, illustrait sa société : cette société se trouvait fondée. […] « Souvenez-vous, dit-il, de ces cabinets qu’on regarde encore avec tant de vénération, où la vertu était révérée sous le nom de l’incomparable Arthénice, où se rendaient tant de personnes de qualité et de mérite, qui composaient une cour choisie, nombreuse, sans confusion, modeste sans contrainte, savante sans orgueil, polie sans affectation. » La causticité du duc de Saint-Simon ne l’a pas empêché de rendre justice à la maison de Rambouillet. « L’hôtel de Rambouillet », dit-il dans une note sur Dangeau (10 mai 1690), « était dans Paris une espèce d’académie de beaux esprits, de galanterie (galanterie est là pour élégance), de vertu et de science, car toutes ces choses s’accordaient alors merveilleusement et le rendez-vous de tout ce qui était le plus distingué en condition et en mérite, un tribunal avec qui fallait compter et dont sa décision avait un grand poids dans le monde, sur la conduite et sur la réputation des personnes de la cour et du grand monde, au tant pour le moins que sur les ouvrages qui s’y portaient à l’examen37. » 35.